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Charles Sitzenstuhl
Question N° 5954 au Ministère de l’économie


Question soumise le 28 février 2023

M. Charles Sitzenstuhl appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur l'émission d'obligations indexées sur l'inflation (OATI) à laquelle recourt la France depuis plusieurs années. Il souhaiterait connaître le raisonnement qui a jadis poussé l'État à faire usage de ce type d'instrument. Face au contexte d'inflation actuel, il lui demande si cet instrument conserve sa pertinence et s'il comporte un risque important pour les finances publiques.

Réponse émise le 19 septembre 2023

La possibilité d'émettre des OAT indexées sur l'inflation (OATi) a été introduite par l'article 19 de la loi n° 98-546 du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier. Le législateur a entendu confier à l'État des moyens complémentaires pour optimiser le coût de sa dette sur longue période, élargir la base d'investisseurs pour sécuriser ses financements et offrir une diversification et une protection supplémentaire aux épargnants, comme le souligne l'exposé des motifs de ce texte. Ces motifs restent d'actualité aujourd'hui, alors que les titres indexés représentent chaque année depuis 2009 environ 10 % des émissions nettes à moyen et long terme. L'émission de titres indexés sur l'inflation répond pour l'État à une stratégie de diversification de son financement, afin qu'il soit plus résilient et moins coûteux pour le contribuable dans la durée. L'État augmente ainsi les canaux dont il dispose pour couvrir ses besoins de financement. En effet, il existe une demande structurelle de produits indexés sur l'inflation. Une OAT à taux fixe compense l'investisseur de l'inflation anticipée à hauteur d'un montant fixe intégré dans son taux d'intérêt, tandis qu'une OAT indexée propose à l'investisseur une compensation ex-post de l'inflation, sur la base de celle effectivement constatée. Alors que la majorité des investisseurs préfèrent des produits à taux fixe reposant sur les anticipations d'inflation (où ils bénéficient notamment théoriquement d'un rendement plus élevé du fait de la « prime d'inflation »), certains recherchent un rendement lié à l'inflation effectivement constatée, tout particulièrement ceux qui ont des engagements exposés à l'inflation, et qui sont prêts à payer la prime d'inflation ex ante pour bénéficier de cette protection. C'est notamment le cas par exemple des distributeurs de produits d'épargne réglementée, dont le taux est indexé sur le livret A, ou d'assureurs qui proposent des contrats indexés sur l'inflation. Les États sont particulièrement bien positionnés pour émettre de tels produits dans la mesure où leurs recettes sont corrélées à l'inflation, tandis que leurs dépenses ne le sont que partiellement. Peu d'acteurs hormis les États possèdent une exposition naturelle à un indice d'inflation macroéconomique à leur actif. Les autres acteurs sont généralement exposés à une inflation sectorielle. Les Etats sont ainsi en mesure de bénéficier d'une couverture de leur bilan par l'émission de titres indexés à l'inflation. Schématiquement, lorsque l'inflation augmente, les recettes des États augmentent généralement également. Les Etats sont donc en mesure de faire face à la hausse de leur charge d'intérêt sans dégrader leur déficit. Cette situation s'est vérifiée en 2022, le déficit public s'est établi à un niveau de 4,7% inférieur à celui de 5% anticipé avant le choc. Au total, dans la durée, l'émission de titres indexés permet d'économiser, par rapport à l'émission de titres à taux fixe, la prime d'inflation. C'est pourquoi les principaux États émetteurs de dette sur les marchés internationaux proposent des titres indexés à l'inflation. A noter que les titres sont structurés de façon à ce que l'impact de l'inflation sur le besoin de financement soit très progressif. L'inflation se traduit par une provision budgétaire annuelle mais elle n'est payée qu'à maturité de chaque titre. Le coût final ne peut donc être apprécié qu'à la maturité du titre. Lorsque l'inflation surprend à la hausse comme en 2022, la charge constatée augmente, mais lorsque l'inflation surprend à la baisse, comme en 2020, la charge baisse. Le surcoût effectivement décaissé une année donnée est presque uniquement celui du titre arrivant à maturité cette année-là, soit une fraction de la provision budgétaire.

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