Intervention de Béatrice Roullaud

Réunion du mercredi 10 avril 2024 à 10h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBéatrice Roullaud :

Je présente un amendement de suppression parce qu'accorder le secret professionnel à des consultations ou des actes juridiques réalisés par des juristes d'entreprise engendrerait trois types d'inconvénients.

Premièrement, celui de porter atteinte à la profession d'avocat, puisque celle-ci, contrairement à la profession de juriste d'entreprise, est soumise à un examen sélectif, à des obligations de formation régulière et à des règles déontologiques strictes. Inévitablement, cela conduira, à terme, à créer une nouvelle profession d'avocat salarié en entreprise. On assisterait de ce fait à un affaiblissement du niveau de la profession, puisque le master n'est pas aussi sélectif et exigeant que l'examen d'avocat. Surtout, cela entraînerait un affaiblissement de l'éthique de la profession, puisque l'avocat salarié n'aurait pas de formation déontologique et ne serait pas non plus indépendant. Il ne pourrait donc pas décider en toute liberté de conscience de s'abstenir d'accomplir tel ou tel acte, car il serait par définition soumis à son employeur.

Deuxièmement, il convient de souligner que le secret professionnel des juristes d'entreprise s'exercerait in rem, c'est-à-dire sur une consultation ou un acte. Or ce serait néfaste pour les justiciables, car ce secret pourrait entraver l'accès à la preuve, pierre angulaire du procès équitable.

Troisièmement, il est faux de prétendre que l'absence de confidentialité des juristes d'entreprise nuirait à la compétitivité des entreprises françaises car aucune étude n'a jamais été produite en ce sens. Au contraire, pour la quatrième année consécutive la France demeure en 2022 le pays le plus attractif d'Europe.

En somme, cette proposition de loi n'apporte rien, son prétendu avantage étant loin d'être démontré. Elle entraîne au contraire beaucoup d'inconvénients et suscite l'opposition de la Conférence des bâtonniers et du Conseil national des barreaux (CNB).

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