Intervention de Freddy Sertin

Séance en hémicycle du lundi 27 mars 2023 à 16h00
Lutte contre le dumping social sur le transmanche — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFreddy Sertin :

Il y a un peu plus d'un an, le 17 mars 2022, l'émoi fut fort face au licenciement massif d'employés français et britanniques de la compagnie P&O Ferries, connue pour effectuer des rotations entre Calais et Douvres. En une journée, l'entreprise britannique a ainsi mis à quai près de 800 marins pour les remplacer par des travailleurs étrangers aux conditions de rémunération nettement inférieures. Le scandale politique causé par cette mesure au Royaume-Uni a récemment amené les autorités britanniques à déposer un projet de loi prévoyant l'application d'un salaire minimum.

Face au constat d'une dégradation des conditions de travail de nos marins, les acteurs français du secteur maritime se sont également mobilisés, notamment en novembre dernier, en réunissant élus locaux et nationaux lors de l'appel de Saint-Malo. Ce temps fort avait pour objectif de sensibiliser le monde politique aux enjeux auxquels font face les armateurs français, afin de promouvoir la régulation des conditions de travail sur le transmanche. Cet appel a bien été entendu, tout d'abord par vous, monsieur le secrétaire d'État, puisque vous avez créé quelques semaines plus tard une charte volontaire garantissant le respect des salaires et minima sociaux du standard français, puis par les parlementaires de tous bords, au sein de cet hémicycle. Dès lors, ce ne sont pas moins de trois propositions de loi qui ont été déposées à l'Assemblée nationale, pour lutter contre le dumping social dans le transport maritime transmanche : la présente proposition de loi du groupe Renaissance, celle de Sébastien Jumel et celle de Pierrick Berteloot.

Le présent texte, dont le premier signataire est Didier Le Gac, a été rédigé en concertation avec toutes les parties prenantes et prévoit des mesures qui tiennent pleinement compte des enjeux pour la filière, mais restent pragmatiques et pourront être appliquées dès l'année prochaine. Monsieur le rapporteur, je tiens donc à saluer votre travail pour lutter contre le dumping social en instaurant un salaire minimum horaire, tout en prévoyant des sanctions pénales qui permettront d'harmoniser les conditions de validité du certificat médical d'aptitude à la navigation maritime.

Comme je l'évoquais précédemment, nous nous sommes toutes et tous émus de la situation vécue par nos marins il y a peu de temps et je salue l'implication des parlementaires sur le sujet. Toutefois, j'appelle à la plus grande vigilance. La tentation est toujours grande de faire d'une telle proposition de loi le véhicule de multiples mesures concernant le secteur maritime. Or, non seulement cela n'aurait pas de sens et nous éloignerait du but initial du texte, à savoir lutter efficacement contre le dumping social transmanche, mais, plus grave, cela pourrait le rendre inopérant, l'inclusion de mesures ne respectant pas les règles européennes risquant de compliquer la suite de son examen. Désormais, nous nous devons de voter une loi forte, responsable et véritablement opérante au 1er janvier 2024.

Oui, nous avons encore beaucoup à faire et d'ailleurs ce texte n'a jamais eu pour vocation de résoudre tous les problèmes que rencontre la filière. Il nous faudra sûrement défendre des évolutions au niveau européen et je sais pouvoir compter sur votre engagement, monsieur le secrétaire d'État, pour travailler de concert avec les représentants français au Parlement européen.

Dès lors, mes chers collègues, j'appelle de mes vœux un travail de coconstruction au sein de cet hémicycle, comme celui mené par chacun des groupes politiques en commission des affaires sociales. Ensemble, nous y avons ainsi adopté des amendements visant à protéger la santé et la sécurité des salariés, en prévenant la fatigue excessive consécutive à des périodes de travail importantes grâce à un temps de repos garanti. Ensemble, nous aurons encore de belles mesures à voter parmi les quatre-vingts amendements que nous avons à examiner. Ensemble, nous aurons par exemple à débattre du montant des sanctions en cas de non-respect du salaire minimum et des règles en matière de repos ; la majorité défendra des amendements sur ces points.

Nous le savons, les marins comptent sur nous pour les accompagner face aux crises et aux difficultés que leur profession rencontre. Je sais donc pouvoir compter sur toutes les voix de notre hémicycle pour adopter la proposition de loi de Didier Le Gac. Il est essentiel, indispensable même, que notre travail collectif aboutisse à un texte de qualité, en plaçant au centre de nos considérations la préservation des droits des salariés et de leurs acquis sociaux.

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