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Gisèle Lelouis
Question N° 8728 au Ministère du ministère de l’intérieur et des outre-mer


Question soumise le 6 juin 2023

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Mme Gisèle Lelouis alerte M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur les défis liés au système mafieux qui gangrène la France et dont la ville de Marseille en est, d'une certaine manière, l'épicentre et la capitale. Le plan de bataille à travers une coopération judiciaire de haute intensité est nécessaire pour traquer toute la chaîne mafieuse, du petit malfrat aux cols blancs et ses bras droits du grand banditisme. Tous les jours, Marseille se réveille ensanglantée par des faits de toute sorte. Le 4 avril 2023, Mme la députée intervenait dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale après un week-end sanglant pour dénoncer ces actes, l'inaction des pouvoirs publics et proposer des solutions. Depuis, rien n'est fait, à part dans l'urgence, alors que Marseille mérite presque des « états généraux » à elle toute seule. Car sur les tranchées des 150 points de deal « officiels » de la ville, c'est la bataille des territoires qui se joue et s'accentue. Les vendettas qui s'amplifient de mois en mois en prenant en otage les habitants de certains quartiers qui vivent sous le couvre-feu de 9 h à 17 h et sont trop souvent victimes d'intimidations ou de dégâts collatéraux. 39 personnes sont décédées à la suite d'une fusillade en 2021, 37 en 2022 et déjà une vingtaine depuis janvier 2023 seulement. 19 « exécutés », d'autres lynchés ou brûlés vifs, sans compter le double en blessés. Le silence des ministères de la justice et de l'intérieur s'accentue à mesure que le rythme du carnage s'accélère. Les médias nationaux ont depuis longtemps mis en sourdine les annonces de nouveaux morts aux champs mafieux, quand la presse locale ne les traite plus que comme des faits divers, tristes et fatalistes. Dans un entretien glaçant et récent, une procureure de Paris avait montré que le diagnostic délivré allait bien plus loin que la « violence extrême » des réseaux criminels des Pays-Bas et de Belgique qui ne « s'interdisent plus rien ». Le diagnostic qu'elle porte est encore plus grave. Il porte sur la constitution de « réseaux tentaculaires » d'un « système mafieux », non plus simplement horizontal dans les quartiers, mais vertical, touchant à tous points l'État et la démocratie. Cette survie de l'État s'illustre selon elle à travers un « niveau de menace qui est telle que l'on détecte des risques de déstabilisation de notre État de droit, de notre modèle économique, mais également des entreprises, à un niveau stratégique majeur ». Elle évoque par ailleurs, des affaires de « corruption douanière ». Par exemple, cinq anciens dirigeants de la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières ont été condamnés en septembre 2022 à des peines de prison pour des dérives liées à la gestion d'un informateur. Elle prévient que l'étape suivante est la corruption généralisée de la police et des magistrats : « c'est-à-dire une infiltration des agents engagés à lutter contre la criminalité ». Elle insiste ainsi : « Encore une fois, sans exagérer, sans fantasmer, il faut se dire que tous les dossiers en cours démontrent aujourd'hui que la réalité de l'infiltration des sociétés par les réseaux criminels dépasse toutes les fictions ». Ce qui trouble et inquiète aujourd'hui les magistrats, ce sont les outils judiciaires anti-criminalité, fragiles ou fragilisés. La Commission nationale de protection et de réinsertion, dite « des repentis », qui permettait de retourner des criminels en les faisant parler et avec une protection était en « état de crise existentielle » selon son président, en février 2023. Depuis 9 ans, le nombre de repentis est resté très faible et il amorce même un reflux depuis 2022. L'Agrasc, l'Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués, dispose de bons résultats financiers puisque l'activité mafieuse est peu contrariée. Mais la balkanisation de l'information du traitement des dossiers du crime organisé alors même que les circuits d'argent sale s'internationalisent risque, à cause du projet de « départementalisation » de la police judiciaire, de renforcer ces mafias. Ce qui interroge sur cette décision de l'État. Pourtant, l'histoire montre qu'il est possible de les annihiler. Il ne faut jamais oublier qu'Al Capone a été arrêté car il ne payait pas ses impôts, que la mafia palermitaine fut démantelée avec le maxi-procès des Boss grâce à une coopération judiciaire totale. Le juge italien Falcone avait alors mobilisé l'État de haut en bas, du centre à sa périphérie, un « pool anti-mafia » afin de décortiquer ce « système parallèle à l'ordre établi, spéculaire, complice ou carrément intégré » qui est constitué dans un « monde logique, rationnel, fonctionnel et implacable ». C'était Palerme en Italie. C'est aujourd'hui Marseille en France. Ce n'est pas juste « Bac Nord », western local, mais un système. Et face au défi mafieux, c'est à l'État de se dresser avant d'être à son tour cancérisé. Avant d'être assassiné en 1992, le juge Falcone disait : « Je ne suis pas un Robin des bois, pas un kamikaze et pas davantage un trappiste. Simplement un serviteur de l'État en terre infidèle ». Elle lui demande donc si elle va sauver Marseille des gangs, ou à défaut l'État de sa politique néfaste.

Réponse

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