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Karl Olive
Question N° 7590 au Ministère auprès du ministre de la santé


Question soumise le 25 avril 2023

M. Karl Olive interroge M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur les suites qui seront données au rapport de l'ANSES : « Campagne nationale de mesure de l'occurrence de composés émergents dans les eaux destinées à la consommation humaine ». En effet, le rapport produit par les experts de l'Agence nationale de sécurité sanitaire révèle la présence d'une vaste contamination de l'eau par des résidus de pesticides sur l'ensemble du territoire. Ce rapport est alarmant et révèle de nombreux risques sanitaires liés à la présence de ces pesticides dans l'eau du robinet, ces pesticides dont la présence échappe aux contrôles réguliers. Il évoque notamment la présence d'un fongicide pourtant interdit depuis 2020 : le métabolite du chlorotalonil R471811 retrouvé dans plus d'un prélèvement sur deux des 136 000 analyses réalisées sur l'ensemble du territoire français et conduisant à des dépassements de la qualité dans plus d'un échantillon sur trois. Cela signifie en effet que plusieurs millions de Français ont reçu à l'eau de leur robinet une eau non conforme aux critères de qualité, alors même que ce pesticide n'est plus utilisé. L'Autorité européenne de sécurité des aliments estime que le chlorotalonil « devrait être classé cancérigène supposé ». En outre, l'Agence de sécurité sanitaire avait annoncé le 15 février 2023 vouloir interdire une autre substance, le S-métolachlore, dont les résidus ont eux aussi été retrouvés dans les nappes phréatiques à des niveaux bien supérieurs aux normes européennes. Ce rapport du 6 avril 2023 confirme cette analyse. Actuellement, les risques environnementaux de pollution des nappes phréatiques et les risques sanitaires liés à la présence de cancérigènes sont urgents à considérer. Aussi, M. Le député souhaite connaître les suites qui seront données à ce rapport, ainsi que l'évolution de la réglementation qui sera faite sur ce sujet. Compte tenu du risque avéré de retrouver dans l'eau des métabolites pourtant interdits depuis plusieurs années, comment assurer un meilleur contrôle et une dépollution rapide des nappes phréatiques et des cours d'eau ? Enfin, il souhaite savoir quelles seront les suites qu'il entend donner à la demande de l'ANSES d'adapter les normes concernant les taux de concentration des métabolites dans l'eau potable.

Réponse émise le 1er août 2023

Dans le domaine des pesticides et des métabolites de pesticides dans les eaux destinées à la consommation humaine, le rôle du ministère chargé de la santé consiste à prévenir et à gérer les risques sanitaires liés à ces polluants. Ainsi, depuis plusieurs années maintenant, la Direction générale de la santé (DGS), a d'une part missionné les agences d'expertise françaises pour disposer de connaissances sanitaires sur les pesticides et leurs métabolites et a, d'autre part, établi et diffusé des consignes pour une recherche ciblée et adaptée à chaque territoire des familles de pesticides pour connaître la qualité de l'eau consommée en chaque point du territoire. La Direction générale de la santé, tout comme les Agences régionales de santé (ARS), maintient plus que jamais sa politique de transparence vis-à-vis des consommateurs et de l'ensemble des acteurs sur la qualité de l'eau distribuée en France via la mise à disposition des données sur son site internet ainsi que par l'accès en open data à l'ensemble des résultats d'analyse. Enfin, la direction générale de la santé (DGS) a établi et diffusé dès 2010 des consignes pour la gestion des situations de présence de pesticides et de métabolites dans les eaux. Ces consignes n'ont pas ou très peu évolué pour les pesticides et les métabolites de pesticides dits « pertinents » tels que les métabolites du chlorothalonil. Sur saisine de la DGS, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) a publié récemment les résultats de la dernière campagne de mesures relatives aux polluants émergents dans l'eau potable. Le but de ces mesures est de regarder la présence de composés chimiques qui ne sont pas ou peu recherchés lors des contrôles réguliers. La situation révélée par ce rapport met en évidence une concentration importante de différents métabolites, dont le métabolite R471811 du chlorothalonil, dans les ressources en eau destinée à la consommation humaine utilisées en France métropolitaine. S'agissant d'un métabolite de pesticide jugé « pertinent » dans les eaux destinées à la consommation humaine, la gestion repose sur le respect de la limite de qualité réglementaire (0,1µg/L) et l'utilisation en cas de dépassement de cette limite et sur une durée limitée (période de dérogation), d'une valeur sanitaire individuelle permettant de prévenir d'un risque sanitaire. Cette valeur sanitaire transitoire (VST) est établie à 3µg/L pour le R471811 du chlorothalonil. A ce jour, la campagne de l'ANSES a mis en évidence des concentrations maximales de 2µg/L. Certaines eaux destinées à la consommation humaine prélevées dans le cadre de cette campagne ne respectent pas les critères de conformité mais ne présentent pas de risque sanitaire, en l'état actuel des connaissances. En cas de dépassement de la limite de qualité, les personnes responsables de la distribution d'eau concernées doivent ainsi déposer une demande de dérogation qui, pour être acceptée, doit s'accompagner d'un plan d'action permettant un respect de la limite de qualité sous un délai ne pouvant pas excéder 3 ans (6 ans si reconduction). Le chlorothalonil (molécule mère) étant interdit, les mesures correctives reposent désormais exclusivement sur le traitement de l'eau. A ce jour, l'abattement par les procédés de traitement classiques des pesticides est très faible et une certaine efficacité n'est observée que via un traitement de type osmose inverse ou sur charbon actif mais avec une fréquence de renouvellement supérieure aux fréquences habituelles. Les résultats de la campagne conduisent à modifier le plan de suivi de la qualité de l'eau vis-à-vis des métabolites du chlorothalonil. S'agissant du contrôle sanitaire des ARS, le programme va progressivement intégrer, à partir de 2023, le chlorothalonil et ses métabolites, en lien avec la montée en compétences des laboratoires agréés pour le contrôle sanitaire des eaux pour rendre des résultats fiables sous accréditation. S'agissant de la surveillance de la personne responsable de la production ou de la distribution d'eau, certaines, ou leurs délégataires, intègrent d'ores et déjà ou progressivement le chlorothalonil et ses métabolites dans les plans de surveillance.

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