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Cécile Untermaier
Question N° 7398 au Ministère de l’intérieur


Question soumise le 18 avril 2023

Mme Cécile Untermaier appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur la nécessaire indépendance de l'Inspection générale de la police nationale (IGPN). Placée sous l'autorité hiérarchique de la direction générale de la police nationale, l'IGPN est en situation de devoir contrôler les autorités qui l'encadrent. L'effectivité de ses qualités d'impartialité et de transparence peut ne pas être admise comme telle et compromettre ainsi la crédibilité de ses inspections. Une inspection générale ne peut se concevoir hiérarchisée administrativement par des services pouvant être l'objet d'un contrôle. Il convient d'éviter que le contrôleur d'aujourd'hui puisse se trouver dans la position du contrôlé de demain. Or tel est le cas des inspecteurs appartenant à l'institution contrôlée, lesquels à l'issue de leur affectation dans ce service d'inspection, doivent reprendre leur fonction ordinaire tandis que certains des agents contrôlés peuvent être affectés à l'Inspection et devenir des contrôleurs. Ainsi, le contrôle de l'inspection générale doit être indépendant. Pour cela, l'IGPN pourrait être placée sous l'autorité directe du ministre de l'intérieur et constituer un véritable corps d'inspection au sens du droit de la fonction publique, distinct de ceux des agents qui exercent leur activité dans les services contrôlés. Dans la continuité des actions menées au sein de son ministère pour diffuser la culture déontologique, avec en particulier la création d'un collège de déontologie présidé par une personnalité extérieure, des dispositions législatives et réglementaires pourraient être prises pour garantir l'indépendance de l'IGPN. Aussi lui demande-t-elle de bien vouloir lui indiquer les mesures que pourrait prendre le Gouvernement pour garantir l'impartialité objective et subjective de cette inspection générale.

Réponse émise le 22 août 2023

Il n'existe aucune impunité dans la police nationale et l'inspection générale de la police nationale (IGPN) est un élément clé, qui n'est d'ailleurs pas le seul, de la transparence et du contrôle en la matière, caractéristiques d'un État de droit. L'action de la police nationale est en effet rigoureusement encadrée, examinée, évaluée et contrôlée par de nombreuses autorités administratives indépendantes, organes et juridictions, au niveau national comme aux niveaux européen et international. Les forces de l'ordre sont en outre placées, dans l'exercice de leurs missions de police judiciaire, sous le contrôle de l'autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle. Il doit aussi être rappelé que tout manquement aux règles professionnelles et déontologiques et, a fortiori, toute infraction qui serait commise par un agent de la police nationale, peut être dénoncée par un simple particulier auprès des autorités de police, d'autorités indépendantes ou de l'autorité judiciaire. La police nationale ne transige ni avec la déontologie, ni avec le respect du droit. Lorsque des manquements déontologiques et professionnels ou des fautes sont suspectés, les faits font l'objet d'enquêtes administratives et, s'ils sont constitutifs d'infractions pénales, d'enquêtes judiciaires. À titre d'exemple, l'inspection générale de la police a engagé, en 2022, 192 enquêtes administratives pré-disciplinaires et a été saisie de 1 065 enquêtes judiciaires. Au-delà, l'essentiel des enquêtes menées en la matière le sont par les directions actives de police elles-mêmes, au titre, pour les enquêtes administratives pré-disciplinaires, de l'exercice de leur autorité hiérarchique et du contrôle interne et, sous la direction de l'autorité judiciaire, pour les enquêtes judiciaires. Tout écart portant atteinte à la déontologie et à l'image des forces de l'ordre est donc combattu avec fermeté. Tout manquement avéré expose son auteur à des sanctions disciplinaires et, s'il est constitutif d'infractions, à des poursuites pénales décidées par l'autorité judiciaire. L'IGPN travaille dans un cadre juridique clair. Les enquêtes judiciaires qu'elle mène sont, comme toutes les procédures pénales, dirigées par des magistrats de l'ordre judiciaire, procureurs de la République ou juges d'instruction, qui veillent à leur bon déroulé. C'est le droit que les agents de l'IGPN appliquent, avec le professionnalisme et les valeurs de tous les agents publics, avec probité et impartialité, mais également avec la technicité qu'exige toute déontologie professionnelle. De ce point de vue, l'IGPN constitue une organisation assez classique, qui se retrouve dans nombre de secteurs publics et privés soumis à des contrôles internes : la déontologie repose d'abord sur un contrôle par les pairs. Il convient également de rappeler que ce n'est pas cette inspection qui est compétente pour sanctionner les fautes des policiers : la discipline relève de l'autorité hiérarchique. Si cette inspection formule des propositions, ce n'est pas elle qui dispose du pouvoir de sanction, qui appartient à l'autorité hiérarchique. Cette inspection générale, hautement professionnelle, accomplit un travail remarquable, qui dépasse de loin le seul contrôle interne puisqu'elle s'investit aussi dans la prévention du risque déontologique, le conseil juridique, l'accompagnement managérial, etc. Il doit également être rappelé que la déontologie, qui est une matière complexe, humaine, ne se réduit pas à de pures techniques juridiques et moins encore à des postures. Il doit aussi être rappelé qu'une réforme en profondeur de cette institution a été menée en 2013. Elle s'est notamment traduite par l'ouverture au public d'une plateforme en ligne de signalements. Loin des caricatures, l'IGPN, qui a une vocation d'exemplarité pour toute la police nationale, est une institution ouverte sur la société. Cette inspection générale est en effet composée d'hommes et de femmes aux profils divers : policiers, mais aussi contractuels venant du secteur privé, apprentis, magistrat administratif, etc. En toute transparence, l'IGPN publie chaque année un rapport d'activité extrêmement détaillé, qu'elle présente à la presse. L'ouverture sur la société se traduit aussi par la mise en place d'instances dédiées et dont la composition dépasse la seule sphère administrative. Après s'être dotée, dès 2013, d'un comité d'orientation du contrôle interne de la police nationale, ouvert à la société civile, le ministre de l'Intérieur et des Outre-mer a décidé, fin 2020, la création d'un comité d'évaluation de la déontologie de la police nationale, composé de membres de la police nationale mais aussi de représentants d'autres administrations (Défenseur des droits, magistrats de l'ordre judiciaire et magistrat de l'ordre administratif) et de la société civile (professeur d'université, avocat, journaliste, dirigeant associatif, conseil économique, social et environnemental). Le ministère de l'Intérieur et des Outre-mer, déjà doté d'un déontologue ministériel, a en outre institué en juin 2020 un collège des inspections générales, présidé par le chef du service de l'inspection générale de l'administration, chargé notamment de veiller à la cohérence méthodologique et déontologique des pratiques professionnelles des inspections générales du ministère. Par ailleurs, en 2022, a été nommée, pour la première fois, une magistrate de l'ordre judiciaire à la tête de l'IGPN. Le ministre de l'Intérieur et des Outre-mer a également décidé, à la suite d'une des recommandations du « Beauvau de la sécurité », que seraient régulièrement publiés, sur le site internet du ministère, dans le respect du droit, des rapports d'inspections qui présentent un intérêt, par leur nature ou la spécificité des faits, pour la relation entre l'administration et la population ou pour la bonne information du public, et notamment de la presse. La loi du 24 janvier 2023 d'orientation et de programmation du ministère de l'Intérieur fixe aussi de nouvelles ambitions en matière de transparence et d'exemplarité de l'action des forces de l'ordre. Le ministère dispose ainsi, depuis mai 2023, d'un collège de déontologie, directement placé auprès du ministre et présidé par un membre du Conseil d'État et composé, notamment, de personnalités extérieures qualifiées, dont un magistrat de l'ordre judiciaire et un universitaire. Il est chargé, en particulier, de promouvoir l'éthique et la déontologie. Les plateformes de signalements gérées par les inspections générales de la police et de la gendarmerie nationales seront également modernisées et améliorées, afin de faciliter les signalements que peuvent faire les particuliers.

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