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Yannick Monnet
Question N° 6854 au Ministère de l’économie


Question soumise le 4 avril 2023

M. Yannick Monnet interroge M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur les conséquences de l'ordonnance n° 2023-78 du 8 février 2023 relative à la prise en charge des conséquences des désordres causés par le phénomène naturel de mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols. En encadrant beaucoup plus strictement le travail des experts d'assurance, qui pourraient être lourdement sanctionnés en cas de manquements ou de dépassement des délais, cette ordonnance suscite l'inquiétude de la profession. En effet, des milliers de dossiers sont à traiter dès la survenue d'un arrêté CATNAT. Les délais d'instruction sont particulièrement longs, dès lors qu'il faut faire appel à des sociétés d'études de sols, pour qui ces études ponctuelles ne constituent pas une priorité par rapport aux autres chantiers. Les experts d'assurances ne maîtrisent donc pas la totalité des délais, dont l'ordonnance en question les rendrait pourtant responsables. De telles dispositions sont de nature à dissuader les experts d'assurances d'accepter les expertises relatives au retrait et au gonflement des argiles. Elles sont, a contrario, de nature à les inciter, pour ne pas risquer d'amendes ou de sanctions, à traiter en priorité ces dossiers (non urgents par nature) au détriment des dossiers des sinistrés climatiques, bien plus urgents. L'élaboration de cette ordonnance n'a, semble-t-il, fait l'objet d'aucune concertation avec les instances professionnelles concernées. Dans un contexte où les aléas climatiques (et donc le nombre d'expertises) vont croissant, il importe de préserver le métier d'expert d'assurance, de le sécuriser, de le rendre attractif. Il lui demande les mesures qu'il compte prendre répondre aux inquiétudes de la profession suite à la publication de cette ordonnance et pour éviter les écueils qu'elle met en avant.

Réponse émise le 4 juillet 2023

L'ordonnance du 8 février 2023 prévoit en effet, parmi plusieurs autres mesures visant à améliorer la prise en charge de ce risque, un dispositif d'encadrement, de contrôle et de sanctions des missions des experts d'assurances réalisant des missions d'expertise relatives à des phénomènes de mouvements de terrain consécutifs à un retrait-gonflement des argiles (RGA). Ces dispositions s'inscrivent dans le contexte des attentes exprimées par de nombreux élus et sinistrés, auxquelles le Gouvernement entend répondre en harmonisant les pratiques afin de réduire la perception du caractère aléatoire de cette expertise et en renforçant la confiance dans l'indépendance de cette profession (pour rappel, le rapport 2021 de la médiation de l'assurance fait état d'une hausse de 70 % des saisines liées aux catastrophes naturelles, portant en particulier sur les contestations d'expertise et insistant sur les phénomènes de sécheresse).  Contrairement à d'autres approches qui présenteraient un risque de contraction immédiate du vivier d'experts d'assurance en RGA et d'allongement important des délais d'indemnisation (obligation d'inscription dans un ordre d'experts, obligation d'une contre-expertise systématique, obligation de réalisation d'une étude de sols systématique également), le Gouvernement a fait le choix, d'une part, de ne pas créer une nouvelle profession réglementée tout en renforçant les exigences formulées vis-à-vis de la profession, d'autre part, de laisser à l'expert la maîtrise de la décision sur la nécessité de réaliser au cas par cas une étude de sols en fonction de chaque sinistre. L'ordonnance ne prévoit pas de délai de réalisation de l'expertise, et n'entraîne par conséquent pas de responsabilité des experts sur des missions qui seraient menées par des entreprises tierces. À cet égard, les services du Gouvernement ont rencontré les représentants des experts d'assurance (FSE-CEA) afin d'évoquer ces dispositions, recenser les pratiques actuelles et préparer un cadre de concertation en vue de la préparation de ce décret. Il a été rappelé que ce décret serait préparé en tenant compte du périmètre direct de la mission de l'expert. S'agissant du dispositif de sanctions prévu par l'ordonnance, il répond au fait que tout dispositif de contrôle doit comporter un cadre de sanctions prévu à un niveau législatif, dont le Conseil d'État évalue notamment le caractère proportionné. L'ordonnance du 8 février 2023 précise à cet égard que ces sanctions « tiennent compte de la gravité du manquement constaté, de sa nature intentionnelle ou involontaire, des préjudices subis en conséquence par les assurés et les entreprises d'assurance ainsi que des mesures prises par l'expert pour remédier aux dysfonctionnements constatés et réparer les préjudices causés ». Il est souligné que les sanctions pécuniaires applicables aux entreprises d'assurances en cas de manquement, qui relèvent de la compétence de la commission des sanctions de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), ne sont pas plafonnées. Il est également précisé, à titre de comparaison, que les experts en automobile encourent, en cas de faute ou de manquement aux conditions d'exercice de leur activité professionnelle, une interdiction d'exercice de leur activité professionnelle pour une durée pouvant atteindre trois ans, voire la radiation de la liste des experts en automobile avec une interdiction de solliciter une nouvelle inscription pendant cinq ans (pour des manquements comportant un enjeu pécunier souvent de moindre ampleur que celui relevant de dommages graves à des habitations), sans que ces mesures ne se traduisent par un vivier réduit d'experts. Ces dispositions visent à renforcer la confiance des sinistrés envers les experts d'assurances en RGA, tout en sécurisant davantage les experts en clarifiant le contenu attendu du rapport d'expertise et ses modalités de réalisation.

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