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Mansour Kamardine
Question N° 5553 au Ministère de l’économie


Question soumise le 14 février 2023

M. Mansour Kamardine interroge M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur l'opportunité de mettre en place dans les départements d'outre-mer, en général et à Mayotte, en particulier, des zones économiques spéciales permettant une meilleure intégration régionale de ces départements et d'en faire de véritables fer de lance des économies française et européenne. Malgré des dizaines d'années de politiques publiques prétendant établir l'égalité économique et sociale dans les départements d'outre-mer, le pouvoir d'achat, l'emploi et la qualité des services de bases à la population (eau, santé, système éducatif, etc.) demeurent très éloignés des normes nationales pour les habitants des départements ultramarins. C'est pourquoi un changement de paradigme semble nécessaire. Les résultats de la zone économique canarienne (ZEC), mise en place au sein de la région ultrapériphérique (RUP) espagnole des Canaries, milite fortement pour qu'un dispositif similaire soit offert aux RUP françaises, en particulier à Mayotte. En effet, la ZEC génère 140 millions d'euros d'investissement et 1 000 emplois par an, faisant des Canaries la région ultrapériphérique européenne la plus dynamique en matière économique et en terme de création d'emploi. Il en est de même en ce qui concerne le dispositif de zone franche de la RUP portugaise des Açores. Afin d'examiner les modalités de dynamisation de l'économie et la création d'emploi dans les régions ultrapériphériques européennes (RUP) françaises, notamment Mayotte où le taux de chômage dépasse les 30 % et où le PIB par habitant ne représente que le tiers de la moyenne nationale, il lui demande d'étudier la pertinence et les effets économiques, sociaux et en terme d'intégration régionale, la mise en place de zones économique fiscale et douanière spéciales dans les départements d'outre-mer, notamment à Mayotte, axées sur ses effets en matière de dynamisation de l'activité économique par l'arrivée d'investissements extérieurs, mais aussi de croissance de la taille des entreprises par un réinvestissement des bénéfices, d'émergence d'entreprises compétitives au niveau régional, ou encore de création d'emplois locaux.

Réponse émise le 29 août 2023

A ce jour, Mayotte s'inscrit dans une double problématique à la fois de développement et de convergence avec l'Hexagone. Le Gouvernement a d'ailleurs annoncé sa volonté de voir l'année 2031, vingtième anniversaire de la départementalisation du territoire, comme celle de la convergence de Mayotte vers l'Hexagone. Les enjeux sont identifiés : le développement économique de l'île est fortement lié aux capacités de développement du secteur privé local et de son tissu productif et celles-ci ne pourront pleinement s'exprimer que si l'environnement institutionnel (tant règlementaire que d'infrastructures et de financements) offre à Mayotte un cadre propice à sa croissance, et assure à terme l'attractivité du territoire. Les îles Canaries ont effectivement mobilisé le levier fiscal afin de favoriser leur croissance économique et l'attractivité de leur territoire. Pour catalyser son développement, Mayotte doit donc mieux utiliser et promouvoir les avantages fiscaux dont le territoire bénéficie déjà aujourd'hui, tout comme les autres départements et régions d'outre-mer (DROM) français, notamment l'aide fiscale à l'investissement et les zones franches d'activité nouvelle génération (ZFANG) crées en 2019, dont la philosophie est proche du régime fiscal canarien, lequel jouit d'une notoriété certaine. En effet, les nombreux dispositifs existant à l'heure actuelle à Mayotte ne sont pas toujours très bien connus, à la fois des entreprises hexagonales et étrangères. Ils sont pourtant des vecteurs d'attractivité et pourraient être mieux valorisés. La définition d'une stratégie de promotion de Mayotte qui mettrait en avant ses avantages fiscaux, en plus de ses autres atouts intrinsèques, semble une étape préalable et nécessaire à son développement économique et à son ouverture extérieure. Par ailleurs, à l'occasion du Comité interministériel des Outre-mer (CIOM) qui s'est tenu le 18 juillet 2023, le gouvernement a annoncé que les outils fiscaux seraient davantage mobilisés pour assurer un soutien renforcé et élargi à toute l'activité industrielle ultramarine. Afin de favoriser la création de valeur en Outre-mer et d'y soutenir l'émergence de nouvelles activités économiques, l'ensemble des Petites et Moyennes Entreprises (PME) relevant de l'industrie, de la réparation navale et de l'édition de jeux vidéo bénéficiera de l'abattement majoré d'impôt sur les sociétés et d'impôts locaux, au titre du dispositif des ZFANG. De plus, en combinant les ZFANG avec des dispositifs douaniers existants, il pourra être envisagé de créer, en coordination avec les collectivités locales, des zones favorables à la création et au développement d'activités manufacturières destinées à l'exportation, notamment en lien avec l'activité portuaire. La mise en place d'un régime fiscal et douanier uniquement spécifique à Mayotte pourrait toutefois soulever un certain nombre de questions juridiques et d'égalité entre les territoires (entre les DROM eux-mêmes, mais aussi avec l'Hexagone), alors même que les outre-mer bénéficient déjà de nombreuses dispositions dérogatoires. Une nouvelle réforme d'ampleur de la fiscalité des DROM, alors même que les ZFANG sont récentes et que leur l'efficacité doit se mesurer sur la durée, pourrait envoyer un signal d'instabilité aux opérateurs économiques et contribuer à la complexité et à l'imprévisibilité des mesures fiscales ultramarines en direction des entreprises. Enfin, le succès économique d'un territoire ne pourrait être attribué à son seul régime fiscal. L'attractivité d'un territoire repose également sur d'autres facteurs comme l'existence d'un marché et d'un tissu économique mature et dynamique, ainsi que la qualité de vie, la sécurité, le niveau des infrastructures et des services. La comparaison des modèles économiques, et notamment fiscaux, canariens et mahorais constitue cependant une bonne manière d'identifier les forces et les faiblesses des dispositifs actuellement en vigueur à Mayotte. Le gouvernement va donc continuer à étudier et explorer les vecteurs d'attractivité du territoire afin de contribuer au développement économique de Mayotte. C'est le sens de l'annonce faite lors du CIOM d'une loi dédiée à Mayotte qui sera proposée aux élus du territoire au plus tard dans les 6 prochains mois afin d'adopter un ensemble de mesures adaptées aux enjeux de l'île.

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