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Laurence Heydel Grillere
Question N° 4499 au Ministère de l’agriculture


Question soumise le 3 janvier 2023

Mme Laurence Heydel Grillere interroge M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire concernant l'évaluation des calamités agricoles « sécheresse 2022 » pour le département de l'Ardèche. Comme bien d'autres départements, l'Ardèche a subi de plein fouet les conséquences dramatiques de la sécheresse de l'été 2022. Les pertes de récoltes des premières coupes de fourrages ont fait l'objet d'alertes auprès de l'administration tant celles-ci étaient alarmantes pour la pérennité des élevages. Des enquêtes de terrain associant chambre d'agriculture et direction départementale des territoires de l'Ardèche ont permis l'établissement d'une carte précise de l'impact climatique avec une identification des zones et des exploitations concernées dans le département. Conformément aux engagements de M. le ministre, la procédure de calamités a été accélérée au profit des éleveurs les plus durement touchés. Les zones qui recouvrent tout ou partie de 12 départements ont ainsi pu faire l'objet d'une reconnaissance partielle lors du comité national de gestion des risques en agriculture du 28 octobre 2022 de manière à initier des versements d'acomptes dès le mois de novembre 2022. Cette accélération importante du calendrier a permis un premier apport de trésorerie crucial au bénéfice des éleveurs les plus affectés afin d'éviter une décapitalisation incontrôlée. Le département de l'Ardèche a ainsi été reconnu en situation de calamité agricole avec un taux de perte de production provisoire de 30 %, ce qui devait permettre le versement des acomptes rapidement. Cependant, lors du comité national de gestion des risques en agriculture du 9 décembre 2022, certaines communes ardéchoises, proposées à 33 % et 36 % de pertes, ont été qualifiées à 0 % de pertes. Elles ne pourront par conséquent pas bénéficier de la reconnaissance au titre de calamité sécheresse. Cette décision provoque l'incompréhension et la colère des éleveurs d'Ardèche car elle met en péril la pérennité de leurs exploitations et le modèle d'agriculture pastorale du département. Elle l'interroge sur les raisons de cette disqualification de communes ardéchoises au titre de la calamité sécheresse et sollicite le réexamen de ces territoires lors du prochain comité national de gestion des risques en agriculture.

Réponse émise le 21 mars 2023

Depuis le début de l'été 2022, le Gouvernement s'est pleinement mobilisé dans un contexte de baisse des rendements et face à des situations individuelles difficiles et hétérogènes. À ce titre, le comité de suivi de la situation de sécheresse dans le monde agricole a été réuni à plusieurs reprises et le Gouvernement a, dès le 5 août 2022, réuni la cellule interministérielle de crise afin de suivre de près la situation sur l'ensemble du territoire national. Dans ce contexte, plusieurs mesures destinées à soutenir les agriculteurs ont été mises en œuvre. Les avances de la politique agricole commune payées au 16 octobre 2022 ont été portées à 70 % pour les aides découplées et 85 % pour l'indemnité compensatoire de handicaps naturels, afin de faire face aux problèmes de trésorerie des exploitations, et notamment des élevages, ce qui représente 1,6 milliard d'euros d'avance de trésorerie. Par ailleurs, les dispositifs de droit commun, à savoir les exonérations de taxe sur le foncier non-bâti et de cotisations sociales, ont été activés. Enfin, le régime des calamités agricoles a été mobilisé pour les cultures éligibles avec un assouplissement des conditions d'accès, au travers de l'abaissement du seuil d'éligibilité de 13 % à 11 % de pertes de produit brut et d'une accélération exceptionnelle de la procédure au profit des éleveurs les plus affectés par les effets de la sécheresse afin d'éviter une décapitalisation non contrôlée. C'est ainsi que les zones recouvrant tout ou partie des douze départements les plus touchés ont pu faire l'objet d'une reconnaissance partielle du comité national de gestion des risques en agriculture (CNGRA) du 28 octobre 2022, de manière à initier des versements d'acomptes dès le mois de novembre 2022 pour les agriculteurs concernés, au fur et à mesure de l'instruction des dossiers par les directions départementales des territoires et de la mer (DDTM). Cette accélération importante du calendrier a permis un premier apport de trésorerie crucial au bénéfice des éleveurs les plus affectés. Par la suite, le CNGRA du 9 décembre 2022 a permis d'arrêter les zones et les taux de pertes définitifs pour les 12 départements susmentionnés, afin d'initier le versement des soldes avant la fin de l'année 2022 et a reconnu 5 autres départements. Ainsi, ont été concernés par un traitement définitif des dossiers les 17 départements suivants : l'Ardèche, l'Aveyron, le Cantal, la Corrèze, la Creuse, la Drôme, l'Isère, la Haute-Loire, la Haute-Vienne, la Loire, le Lot, la Lozère, le Rhône, le Puy-de-Dôme, les Pyrénées-Atlantiques, le Tarn et le Tarn-et-Garonne. Dans ce cadre, le CNGRA du 9 décembre 2022 a émis un avis favorable à la reconnaissance de 234 communes situées au Nord, à l'Est et au Sud du département de l'Ardèche, le niveau de pertes sur les prairies, établi par le faisceau d'indices du niveau de la pousse des prairies cumulée sur l'ensemble de l'année de production, étant supérieur au seuil de reconnaissance de 30 % par rapport à un historique de la moyenne olympique sur 5 ans. Ce faisceau d'indices est constitué de l'estimation de la perte affectant les prairies réalisée lors des missions d'enquête conduites sous l'égide des DDTM, recoupée avec l'évaluation du niveau de pousse des prairies par des indices basés sur des modèles agrométéorologiques ou sur des mesures satellitaires. Le CNGRA a en revanche émis un avis défavorable à la reconnaissance du reste du département. En effet, si la mission d'enquête y estime les pertes de 33 à 36 %, les indices de pousse des prairies évaluent de façon concordante que le niveau des pertes est inférieur à 10 % en 2022 sur cette partie du département, ne permettant donc pas d'établir que la perte de récolte ayant affecté les prairies sur la zone considérée dépasserait le seuil de reconnaissance de 30 % par rapport à la référence réglementaire. Le CNGRA s'est enfin réuni le 18 janvier 2023 pour statuer sur les autres demandes de reconnaissance des départements touchés par la sécheresse déposées au 1er décembre 2022. C'est ainsi que les zones de 27 départements supplémentaires ont été reconnues, à savoir pour les départements du Jura, de l'Ain, de la Savoie, de la Haute-Savoie, des Hautes-Alpes, du Vaucluse, du Gard, de l'Hérault, de l'Aude, des Pyrénées-Orientales, de la Haute-Garonne, des Hautes-Pyrénées, du Gers, du Lot-et-Garonne, de la Dordogne, de la Charente, des Deux-Sèvres, de la Vienne, du Maine-et-Loire, de la Sarthe, du Loir-et-Cher, de l'Yonne, de la Meuse, des Vosges, du Bas-Rhin, de la Meurthe-et-Moselle et de la Moselle. L'accélération de la procédure a donc permis de gagner jusqu'à plus de 4 mois sur le calendrier habituel de versement des calamités sécheresse. Par ailleurs, face à l'intensité de l'épisode de sécheresse et des difficultés auxquelles font face les éleveurs, le Gouvernement a pris la décision exceptionnelle de relever le taux d'indemnisation de 28 % à 35 %. Au-delà de cette réponse d'urgence, à l'avenir, la réforme des outils de gestion des risques climatiques en agriculture permettra d'améliorer l'accompagnement des exploitants face à ces événements climatiques toujours plus intenses et fréquents. Cette réforme est indispensable pour préserver la souveraineté alimentaire de la France et favoriser la résilience de son agriculture face à ces nouveaux défis. Ainsi, la loi n° 2022-298 du 2 mars 2022 instituant le nouveau dispositif de gestion des risques climatiques en agriculture, unique, partenarial et universel, est entrée en vigueur en 2023. Le nouveau dispositif repose sur la solidarité nationale et le partage équitable du risque entre l'État, les agriculteurs et les entreprises d'assurance. Enfin, l'investissement dans la formation à la prévention et à la gestion des risques climatiques est un enjeu crucial pour faire face aux conséquences du changement climatique. Il sera traité au sein du pacte et de la loi d'orientation et d'avenir pour l'agriculture, qui font l'objet d'une concertation nationale devant s'achever d'ici la fin du premier semestre 2023.

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