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Jérémie Patrier-Leitus
Question N° 2473 au Ministère de l’intérieur


Question soumise le 25 octobre 2022

M. Jérémie Patrier-Leitus attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur l'absence de bulletins de vote en braille adaptés aux personnes souffrant de handicap visuel. À l'issue d'élections présidentielles et législatives ayant mobilisé à plusieurs reprises les électeurs sur une courte période, la difficulté des personnes déficientes visuelles pour exercer leur droit de vote s'est à nouveau manifestée. L'article L. 62-2 du code électoral dispose que « les bureaux et les techniques de vote doivent être accessibles aux personnes handicapées quel que soit le type de ce handicap... ». Cependant, en l'absence de bulletins déchiffrables mis à disposition, les personnes malvoyantes et aveugles ne peuvent pas voter de manière autonome, sans être accompagnées. De ce fait, le respect de la confidentialité de leur vote n'est pas garanti. Au nom du principe de l'égalité entre tous les citoyens vis-à-vis du processus électoral, un des fondements de la démocratie, il est nécessaire de remédier à cette difficulté à laquelle près de 3 % de la population française est confrontée. La distance des prochaines échéances électorales, actuellement prévues à l'horizon 2024, peut devenir l'occasion d'anticiper cette problématique, ainsi que les difficultés techniques qui y sont liées - telles que les délais de tirage, le faible nombre d'imprimeurs réalisant des documents en braille ou le conditionnement des bulletins en braille. Il lui demande donc quels dispositifs seront mis en œuvre afin de faciliter la participation électorale autonome des personnes déficientes visuelles et de leur garantir le secret du vote.

Réponse émise le 21 février 2023

Plusieurs démarches ont été entreprises en vue de promouvoir l'accès des personnes malvoyantes ou aveugles aux opérations électorales, tant pour l'accessibilité de la campagne électorale que pour les démarches de vote dans le bureau de vote. En premier lieu, le ministère de l'Intérieur et des Outre-mer assure la diffusion, à l'occasion de chaque élection, de plusieurs guides pratiques relatifs à l'accessibilité du processus électoral aux personnes handicapées à destination des présidents de bureau de vote, des candidats et des médias. Ces guides, élaborés conjointement avec le ministère de la Santé et de la Prévention, ainsi que le ministère en charge des Solidarités, de l'Autonomie et des Personnes handicapées, ont été actualisés en 2022. En deuxième lieu, depuis mai 2019, les candidats aux diverses élections sont systématiquement encouragés à déposer, auprès des services compétents, une version numérique de leur profession de foi destinée à être mise en ligne sur un site internet dédié (www.programme-candidats.interieur.gouv.fr). Cette version numérique doit respecter les normes en matière d'ergonomie (taille des caractères modulable, plug-in de lecture d'écran pour les personnes non équipées de logiciels spécialisés, etc.) et permettre la vocalisation du document numérique de propagande électorale. Ce dispositif, qui a notamment pour objectif de faciliter l'accès de la propagande électorale aux personnes atteintes d'un handicap visuel, a été rendu obligatoire dans le cadre de l'élection présidentielle en 2021 (art. 18 du décret n° 2001-213 du 8 mars 2001 modifié par le décret n° 2021-358 du 31 mars 2021). Cette obligation a en outre été étendue aux autres élections générales, à l'exception des élections municipales dans les communes de moins de 2 500 habitants (art. 23 du décret n° 2021-1740 du 22 décembre 2021). Les candidats à l'élection présidentielle, ainsi que les candidats aux élections législatives et régionales, doivent désormais déposer une version de leur profession de foi électorale en langage « Facile à lire et à comprendre » (FALC), qui est mise à disposition des électeurs en ligne (cf. articles susmentionnés) sur le site www.programme-candidats.interieur.gouv.fr pour les élections législatives et régionales et sur un site dédié géré par la Commission nationale de contrôle de la campagne en vue de l'élection présidentielle (CNCCEP) s'agissant de l'élection présidentielle. Le choix du format numérique a été privilégié afin de préserver l'égalité entre les candidats et le secret du vote. En effet, le nombre et la localisation des électeurs non-voyants ne peuvent être connus, puisqu'aucune indication de ce handicap ne peut – ni ne doit – figurer sur les listes électorales et ne peut donc permettre l'envoi différencié de professions de foi éditées en caractères agrandis ou en braille. En troisième lieu, s'agissant de l'accessibilité des bureaux de vote, le code électoral prévoit que leurs locaux d'implantation doivent être accessibles, le jour du scrutin, aux personnes handicapées, et ce quel que soit leur handicap (art. D. 56-1 du code électoral). Cette obligation est rappelée à l'occasion de chaque scrutin aux autorités en charge de l'aménagement des bureaux de vote.  Enfin, afin d'assurer la possibilité pour ces électeurs de voter, le code électoral prévoit que tout électeur atteint d'infirmité certaine et le mettant dans l'impossibilité d'introduire son bulletin dans l'enveloppe et de glisser celle-ci dans l'urne, ou de faire fonctionner la machine à voter, est autorisé à se faire assister par un électeur de son choix. Ces dispositions, issues de l'article L. 64 du code électoral, permettent l'expression et la sincérité du vote d'un électeur malvoyant, ce que la mise à disposition de bulletins en braille ne permettrait pas de garantir. En effet, cette proposition a été étudiée, mais elle présente un risque difficile à maîtriser, en raison des capacités limitées de contrôle de ces bulletins par la commission de contrôle des opérations électorales et par les délégués, ainsi que par les autres membres du bureau de vote. A titre d'exemple, la substitution, qu'elle soit accidentelle ou frauduleuse, de quelques exemplaires voire d'une pile de bulletins en braille au nom d'un candidat par quelques exemplaires ou par une autre pile de bulletins en braille au nom d'un autre candidat serait invérifiable par les autorités en charge de la tenue du bureau de vote et par celles exerçant le contrôle des opérations de vote, tant qu'aucun électeur malvoyant locuteur du braille ne l'aura détecté et signalé de lui-même. Les occurrences de tels accidents ou tentatives de fraude seraient constitutifs d'atteinte à la sincérité du scrutin.

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