Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Christine Engrand
Question N° 2190 au Ministère de la transition énergétique


Question soumise le 18 octobre 2022

Mme Christine Engrand appelle l'attention de Mme la ministre de la transition énergétique sur l'encadrement de la méthanisation. La méthanisation a le vent en poupe, mais certaines questions restent cependant en suspens. En effet, si la promesse des méthaniseurs est séduisante, la réalité suggère quant à elle qu'un encadrement légal strict doit être établi au plus vite. On constate en effet que plusieurs avaries assombrissent le tableau. En outre, la méthanisation est sujette à un processus d'industrialisation de la production, déjà à l'œuvre en Allemagne, menaçant directement le fonctionnement de l'agriculture française à plusieurs niveaux. Tout d'abord au niveau des surfaces agricoles, la méthanisation n'absorbe pas moins de 370 000 hectares de surface agricole d'après FranceAgrimer, soit une superficie équivalente à la moitié de la surface totale du Pas-de-Calais. Ensuite au niveau des ressources, les même coproduits qui sont normalement destinés à l'alimentation des bêtes d'élevage sont employés largement dans la méthanisation. Cette confrontation à arme inégales risque d'amputer l'agriculture française de sa paysannerie et de ses éleveurs au profit de holdings du biométhane, ce qui conduirait inévitablement à avoir troquer une perte de souveraineté énergétique contre une perte de souveraineté alimentaire. Alors que le en même-temps serait pour une fois le bienvenue, elle aimerait savoir comment Mme la ministre envisage d'éviter cet écueil.

Réponse émise le 6 juin 2023

Le gouvernement est engagé dans le développement de la filière de production de biométhane, énergie renouvelable territoriale nécessaire pour renforcer notre souveraineté énergétique et assurer notre trajectoire de décarbonation. Grâce au soutien apporté par l'Etat, le développement de la filière de production de biométhane s'est accéléré au cours des derniers mois et la capacité d'injection de biométhane dans les réseaux s'élève désormais à plus de 10 TWh/an. Afin d'atteindre les objectifs fixés par la Programmation pluriannuelle de l'énergie à l'horizon 2028 et sortir de la dépendance aux énergies fossiles, le développement de l'injection de biométhane doit se poursuivre pour atteindre une production injectée de 14 à 22 TWh par an et pour porter la part des énergies renouvelables à au moins 10% de la consommation de gaz à l'horizon 2030. Ces objectifs seront revus dans le cadre de la prochaine Programmation Pluriannuelle de l'Énergie. La question de l'approvisionnement des installations de méthanisation est fondamentale pour éviter la concurrence de la production d'énergie à partir de biomasse avec les usages alimentaires, à la fois en ce qui concerne les productions elles-mêmes, mais aussi les surfaces agricoles. Cette question a été prise en compte dès l'élaboration de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, qui a introduit en 2015 une limite pour l'approvisionnement des installations de méthanisation par des cultures alimentaires. Le décret n° 2016-929 du 7 juillet 2016 limite à 15 % du tonnage brut total des intrants par année civile les cultures alimentaires ou énergétiques, cultivées à titre de culture principale. Par ailleurs, la politique européenne évolue vers des modèles plus durables pour l'approvisionnement des installations de méthanisation. Les pays où le biogaz est produit avec une utilisation massive de cultures énergétiques dédiées s'orientent désormais vers la valorisation de davantage de sous-produits agricoles et de déchets, rejoignant ainsi le modèle français promu par le Plan Energie Méthanisation Autonomie Azote (plan EMAA). La politique européenne encadre le changement d'affectation des terres, c'est-à-dire les situations dans lesquelles des cultures destinées à la production d'énergie occupent des terres auparavant consacrées aux cultures alimentaires, lesquelles risquent alors d'être déplacées dans des zones non exploitées jusque-là. La directive 2018/2001 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 relative à la promotion de l'énergie produite à partir de sources renouvelables, dite « directive RED II » apporte un renforcement de ces principes, en étendant les exigences d'origine des matières premières et de réduction des émissions de gaz à effet de serre déjà applicables à la filière des biocarburants aux autres bioénergies, dont la méthanisation. Dans le cadre de l'élaboration de la stratégie française énergie et climat, une attention particulière sera portée sur les bioénergies afin de tenir compte des disponibilités en biomasse au niveau national, et de hiérarchiser ses usages en priorisant l'alimentation humaine et animale et en fléchant son utilisation vers les secteurs où c'est le plus efficace ou ayant le moins d'alternatives.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.

Inscription
ou
Connexion