Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Katiana Levavasseur
Question N° 11270 au Ministère auprès de la ministre du travail


Question soumise le 12 septembre 2023

Mme Katiana Levavasseur appelle l'attention de Mme la ministre déléguée auprès de la ministre des solidarités et des familles, chargée des personnes handicapées, sur le danger que fait peser, sur l'habitat inclusif, l'ordonnance du juge des référés du Conseil d'État du 20 février 2023, confirmant l'avis de la commission de sécurité du service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de la Sarthe, qui requalifie un immeuble accueillant 7 personnes, ou plus, en situation de handicap en établissement recevant du public (ERP). L'habitat inclusif constitue une réponse complémentaire venant enrichir la palette d'offre d'accompagnements des personnes dites handicapées. Ce modèle d'habitat regroupé est un modèle qualifié « d'habitat inclusif », parce qu'il permet le renforcement du lien social avec tout un chacun dans le cadre du droit commun. Il est constitué d'appartements conçus en matière de modulation intérieure des surfaces dès l'origine pour accueillir des personnes dites handicapées dans des immeubles ordinaires comportant de nombreux appartements offerts à la location à la population générale. Aujourd'hui, un habitat inclusif peut être constitué de plusieurs logements individuels par immeuble, sans limite systématique du nombre de personnes accueillies. Ce dispositif est d'ores et déjà déployé en réponse aux demandes d'un certain nombre de personnes concernées. Or sur saisine de la ville du Mans, une ordonnance du juge des référés du Conseil d'État du 20 février 2023 requalifie un immeuble accueillant 7 personnes (ou plus) en situation de handicap en établissement recevant du public (ERP). Cette décision pourrait à terme venir fortement impacter les habitats inclusifs déjà existants et ceux en cours de développement qui comprennent, pour une majorité, plus de 7 logements. Elle envoie par ailleurs un message particulièrement « anxiogène » aux bailleurs privés et sociaux, aux porteurs de projets et aux personnes concernées et pourrait conduire à une remise en cause d'un grand nombre de projets dont les habitats regroupés. En effet, si cette décision faisait jurisprudence, les propriétaires seraient amenés soit à réaliser et à financer de très lourds travaux d'aménagement, soit expulser les personnes en situation de handicap pour éviter les contraintes imposées par la décision du Conseil d'État. Aussi, une mise en cohérence des politiques publiques s'impose. Mme la députée appelle donc le Gouvernement à veiller à ce que les difficultés soulevées par l'arrêté du Conseil d'État ne compromette pas l'avenir des dispositifs de ce type d'habitats, constituant une réponse complémentaire très utile à la palette des solutions existantes en matière d'hébergement et d'accompagnement des personnes dites handicapées. Elle lui demande en outre de traiter en toute urgence cette question en mobilisant les moyens financiers permettant de couvrir les surcoûts dus à cette requalification en ERP d'un habitat inclusif dès lors qu'il comprendrait plus de six appartements.

Réponse émise le 7 mai 2024

Choisir son chez soi et y vivre durablement est une demande forte et légitime des personnes en situation de handicap, quelle que soit leur situation. La loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (loi ELAN) a ainsi fait entrer dans le droit commun l'habitat inclusif. Alternative au logement totalement autonome et à l'hébergement en établissement, l'habitat inclusif est un mode d'habitat regroupé assorti d'un projet de vie sociale et partagée. Il est ouvert indifféremment aux personnes handicapées, aux personnes âgées et à toute personne qui fait le choix de ce mode de vie. Favorisant l'insertion des habitants, en leur permettant de conserver leur autonomie et de disposer de leur logement propre tout en leur assurant un accompagnement adapté à domicile, l'habitat inclusif constitue une réponse intéressante aux besoins et aux souhaits des personnes en situation de handicap, dans un contexte global de transformation de l'offre médico-sociale. Dans ce cadre, le Gouvernement doit concilier deux ambitions : accélérer le déploiement de nouveaux habitats inclusifs, solution de plus en plus plébiscitée, et garantir la sécurité des habitants, qui peuvent constituer un public vulnérable. Cet engagement a été rappelé lors du comité interministériel de l'habitat inclusif du 21 février 2023, particulièrement dans le domaine de la sécurité incendie. L'ordonnance en référé du Conseil d'Etat n° 470899 du 20 février 2023, requalifiant un habitat inclusif de la ville du Mans en établissement recevant du public, a ainsi été analysée avec la plus grande attention par les services compétents, qui en tirent toutes les conséquences. Des travaux ont ainsi été engagés au niveau interministériel pour faire évoluer la réglementation applicable à ce type de logement. Des échanges entre les services du ministère de l'Intérieur, ceux du ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires en lien avec le ministre délégué chargé du logement ainsi que ceux du ministère des solidarités et des familles en lien avec la ministre déléguée chargée des personnes handicapées sont en cours, et devraient aboutir à une solution juridique complète. Les différents acteurs du secteur sont également associés à cette démarche. Une telle réglementation doit concilier le développement, légitime, de l'habitat inclusif sur l'ensemble du territoire national, avec la nécessaire préservation de la sécurité de tous les occupants de ces logements, ainsi que des services de secours appelés à intervenir en cas de sinistre. La loi n° 2024-317 du 8 avril 2024 portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir et de l'autonomie prévoit à son article 37 que pour l'application des règles de sécurité mentionnées à l'article L. 141-2 du code de l'action sociale et des familles, les locaux dans lesquels est établi l'habitat inclusif constituent des bâtiments à usage d'habitation. Des règles spécifiques en matière de sécurité contre les risques d'incendie seront déterminées par la suite par voie réglementaire.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.

Inscription
ou
Connexion