Intervention de Paul-André Colombani

Séance en hémicycle du lundi 14 novembre 2022 à 16h00
Comités sociaux et économiques de la poste — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaul-André Colombani :

Aborder les conditions du dialogue social au sein d'une entreprise telle que La Poste n'a rien d'anodin. D'abord, cela nécessite de prendre en considération la pluralité des statuts des employés, qu'ils soient fonctionnaires, agents contractuels de droit public, salariés, mais aussi intérimaires. Cette coexistence a justifié l'instauration d'instances représentatives du personnel adaptées aux spécificités de l'entreprise.

Surtout, au-delà de ces particularités statutaires, La Poste assure au quotidien des missions de service public, qu'il s'agisse du service postal, de l'accessibilité bancaire, de l'aménagement du territoire ou encore du transport de la presse : ces prérogatives sont essentielles pour l'ensemble des Français, en particulier ceux qui habitent dans des territoires géographiquement isolés.

C'est pourquoi s'assurer de la qualité du dialogue social et des conditions de travail au sein de cette entreprise, c'est aussi participer à la qualité de son service public sur l'ensemble du territoire. Cela est d'autant plus important à l'heure actuelle que La Poste a connu, ces dernières années, de multiples difficultés, obligeant les usagers à s'adapter : présence territoriale en baisse, avec 5 300 bureaux de poste dits de plein exercice dans l'ensemble du pays contre 8 414 en 2017 ; fracture numérique, avec la dématérialisation des services postaux qui accroît les inégalités dans l'accès à ces services ; hausse tarifaire, avec le prix du timbre vert passé de 46 centimes en 2003 à 1,17 euro en 2022, enfin, bien entendu, augmentation de la pénibilité du travail, soulignée par les personnels des centres de tri et des agences postales.

Malgré ces défis, La Poste est et reste un acteur indispensable dans la vie de nos territoires. Elle est vecteur de lien social car elle permet de lutter contre l'isolement des personnes âgées ou à mobilité réduite ; elle est utile et concrète. Pour résumer, elle aspire à traiter partout ses usagers comme des personnes et non comme des numéros et il est de notre responsabilité de lui en donner les moyens. C'est pourquoi le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires formule deux exigences concernant ce texte qui prévoit la mise en place des CSE au sein de La Poste.

La première exigence est le respect de la négociation. Nous prenons acte des concertations en cours entre la direction et les organisations syndicales, mais il est indispensable de prolonger la période de transition jusqu'à la fin 2024, car cette réforme constitue un chantier de grande ampleur. Le bilan provisoire des CSE est pour le moins mitigé : nous déplorons de nombreuses situations de carence, avec une majorité de CSE mis en place de manière unilatérale, et non à l'issue d'un accord. Afin d'éviter ces écueils, nous réaffirmons le besoin d'instances de représentation suffisamment nombreuses, suffisamment proches des personnels et armées pour aborder tous les sujets, en particulier la santé et la prévention des risques psychosociaux. La disparition des CHSCT ne doit pas faire passer ces questions au second plan.

Notre seconde exigence est celle de la proximité. Nous devons préserver l'ancrage territorial, condition sine qua non de la bonne tenue du dialogue social au sein de La Poste. La réduction du nombre d'instances fera nécessairement perdre en proximité géographique et cette question se pose avec plus d'acuité encore dans les territoires ultramarins et en Corse : les premières propositions ne prévoyaient d'ailleurs qu'un seul CSE pour l'ensemble de l'outre-mer et aucun pour la Corse, ce qui n'est évidemment pas acceptable. Il semblerait que la direction soit prête à évoluer sur ce sujet et nous saluons l'engagement du rapporteur en la matière. Si nous sommes d'accord avec lui pour considérer que la loi ne doit pas être bavarde, nous regrettons la fâcheuse habitude qui consiste à faire des territoires insulaires les grands oubliés de ce genre de réforme – cela s'est vérifié une fois encore.

C'est pourquoi nous proposerons par voie d'amendement que l'ancrage territorial soit inscrit dans la loi, sans préempter le résultat des négociations internes entre les syndicats et la direction. Il serait d'ailleurs incohérent qu'une entreprise qui a fait de la proximité son maître mot s'en affranchisse au moment d'organiser la représentation de son personnel.

De la forte diversité des métiers, des missions et des territoires naît la nécessité d'instances représentatives suffisantes et proches des employés représentés. Par conséquent, nous défendrons une vision territorialisée de la réforme, dans l'intérêt des personnels de La Poste et de l'ensemble des usagers.

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