Intervention de Olivier Dussopt

Réunion du mercredi 19 octobre 2022 à 16h45
Commission des affaires sociales

Olivier Dussopt, ministre :

Même si le Gouvernement a engagé sa responsabilité sur la première partie du PLF, cela n'obère pas la discussion sur la seconde partie.

J'assume totalement la différence de périmètres : le budget dépasse les 20 milliards d'euros, avec un effet de périmètre puisque, je l'ai dit, certaines mesures financées par le plan de relance en 2022 ne le sont plus cette année, qu'il s'agisse du FNE ou des primes d'apprentissage, qui sont réintégrées au budget.

Ceux qui sont attachés à ces dispositifs peuvent s'en féliciter alors que la logique du plan de relance était plutôt de s'éteindre à la fin de 2022. Je pense que nous finançons effectivement des dynamiques autour de la compensation des exonérations. Nous n'ajoutons pas d'exonération – vous l'avez noté, monsieur le rapporteur – mais la dynamique de compensation des exonérations est liée à la dynamique de l'emploi, traduction d'une bonne nouvelle sur ce front. Il est logique que le budget de l'État finance la compensation auprès des organismes de sécurité sociale.

Je suis surpris que l'on puisse s'interroger sur l'évolution du programme 102, alors que les crédits destinés à l'IAE et à d'autres dispositifs sont en hausse. La légère inflexion à la baisse tient à la diminution des crédits consacrés aux ASS, qui est la traduction mathématique du fait que 146 000 demandeurs d'emploi de très longue durée ont retrouvé une activité. C'est une très bonne nouvelle. Souhaiter l'augmentation de ce budget reviendrait à souhaiter une augmentation du nombre de bénéficiaires de l'ASS. Il convient plutôt de se féliciter de leur sortie par l'emploi du dispositif.

Je vous mentirais en affirmant que le ministère du travail n'aura recours à aucun cabinet de conseil. Cela étant, j'appliquerai strictement la circulaire encadrant cette pratique. Nous créons des postes, en particulier au sein de la DGEFP, pour internaliser des actions qui étaient jusqu'à présent confiées à de tels cabinets. Ne restent que des cabinets compétents en matière d'informatique et de systèmes d'information notamment, dont nous ne pourrons pas nécessairement nous passer. Par l'intégration de nouveaux moyens humains, nous respecterons cependant la circulaire et les objectifs de baisse en pourcentage définis par le Gouvernement.

Vous vous interrogez aussi sur les dépenses de communication, dont le poids dans le budget – 10 millions sur un total de 20 milliards d'euros – reste limité. Il reste que nous souhaitons mener des campagnes de communication relatives au lancement de France Travail et d'un certain nombre de réformes qui nécessitent des explications.

J'en viens aux questions relatives à l'IAE. Je vous rassure : les crédits que nous prévoyons pour l'IAE sont en augmentation, par rapport tant à la LFI qu'au réalisé 2022. Ces trois dernières années – le covid-19 n'y a pas été étranger –, les objectifs n'ont été atteints en matière ni de nombre de places ni de nombre de personnes concernées. 7 000 places supplémentaires sont prévues par rapport au réalisé 2022, tout en tenant compte de l'inflation. Les discussions se poursuivent sur la répartition des fonds entre les différentes structures. Pour les entreprises adaptées, le nombre de places est stable, avec des crédits en augmentation pour accompagner un certain nombre d'évolutions et tenir compte des effets de l'inflation.

La forme juridique que prendra France Travail n'est pas encore définie, mais, je l'ai dit le 13 septembre, ses fonctions correspondront essentiellement à des tâches de coordination. Cette initiative traduit la volonté de disposer d'un diagnostic et d'une orientation partagés. Il ne s'agira en aucun cas de la fusion des acteurs existants : ni celle de Pôle emploi et des missions locales, ni celles d'organismes entre eux, sauf s'ils le souhaitent. Telle n'est pas l'orientation retenue.

S'agissant des territoires zéro chômeur de longue durée, avec un budget qui passe de 36 à 45 millions d'euros, la trajectoire permet de tenir les engagements pris. L'enveloppe finance les soixante territoires autorisés : dix depuis l'expérimentation de 2016 et cinquante de plus depuis 2020. Ce qui devra être fait lorsque les soixante auront été atteints fait l'objet de discussions. Il sera possible de déroger à cette limite par décret en Conseil d'État, mais d'autres questions portent sur l'évaluation que nous devons conduire comme le prévoit la loi d'expérimentation.

Le budget prévoit 300 000 CEJ. Il y aura là aussi un progrès puisque les 300 000 de 2022 intégraient les garanties jeunes qui ont été réalisées.

France compétences rencontre en effet des difficultés. L'État intervient directement, pour la première fois, en LFI à hauteur de 2 milliards d'euros. Habituellement, cela n'avait été traité qu'au travers des projets de LFR et nous aurons probablement l'occasion de revoir ce qui peut être fait en cours d'année, en fonction du niveau des primes d'apprentissage et du niveau de prise en charge des coûts. J'ajoute à cela les travaux relatifs au compte personnel de formation.

Je terminerai, sans avoir été exhaustif, par traiter deux questions évoquées par beaucoup d'entre vous : Pôle emploi et l'inspection du travail. Avant cela, je dirai simplement que, en matière de mutations économiques et d'accompagnement des transitions, nous disposons d'outils. Il s'agit d'abord des crédits de France 2030 – je pense notamment à l'appel à manifestations d'intérêt sur les compétences et métiers d'avenir qui nous permettra de mobiliser des crédits extrabudgétaires, mais aussi à nos actions en matière de transitions collectives et au bénéfice du FNE-Formation. L'objectif est non seulement de former en vue du reclassement de salariés d'entreprises en difficulté, mais aussi de financer l'évolution de compétences de salariés d'entreprises dont les processus technologiques évoluent. J'étais hier, comme certains d'entre vous peut-être, avec les professionnels de l'automobile. Le Groupe Renault évalue à près de 20 000 personnes le nombre de ses salariés qui doivent être formés à de nouvelles technologies – hydrogène, hybride, etc. –, leur formation au fonctionnement des moteurs thermiques n'étant plus adaptée.

Concernant Pôle emploi, les crédits exécutés en 2017 et 2018, hors pactes régionaux d'investissement dans les compétences, s'élevaient en moyenne à 5,26 milliards d'euros. En 2023, ce montant sera de 6,48 milliards d'euros, soit une augmentation nette d'un peu plus de 1,2 milliard hors crédits consacrés aux volets régionaux des PIC. Les moyens humains de Pôle emploi évoluent également. Le nombre des emplois permanents passera de 46 742 en 2017 à 48 847 en 2022, soit une augmentation de 2 100. S'y ajoutent les emplois en CDD ou en apprentissage, au nombre de 3 176 en 2017 et de 3 990 en 2022. Au total, les effectifs passent de 49 918 à 52 837 ETP. En 2023 comme en 2022, les CDD représentent un peu moins de 5 % du total de ces emplois. Nous surveillons de près ce point et nous veillons à ce que les emplois créés à l'occasion de la crise soient, dans leur immense majorité, maintenus, afin d'accompagner le plan de réduction des tensions et l'amélioration et l'intensification de l'accompagnement.

Enfin, s'agissant de l'inspection du travail, le rapporteur pour avis a justement relevé un certain nombre de difficultés. Malheureusement, ce n'est pas avec 15 % de vacances de poste mais avec 16 % que nous devons composer. Ceci renvoie à des difficultés structurelles, qui sont notamment liées à l'attractivité des métiers. Nous essayons d'y répondre. Un certain nombre de revalorisations de grilles sont intervenues. J'ai inscrit 2,5 millions d'euros qui viennent s'ajouter à des crédits pris en gestion sur 2022 pour revaloriser l'indemnisation de fonctions, de sujétions et d'expertise (IFSE) de l'inspection du travail. Nous maintenons le dispositif de nomination d'inspecteurs par détachement pour disposer de nouveaux canaux de recrutement. Nous maintenons les possibilités, hors fonctions d'inspection, de recrutement de contractuels pour un apport administratif aux services de l'inspection du travail (SIT) et nous avons augmenté sensiblement les promotions : nous allons ainsi ouvrir 200 postes d'inspecteurs du travail supplémentaires aux différents concours et modes de recrutement.

Nous devons également clarifier l'organisation. Deux mouvements se sont en fait rencontrés. Le premier concernait l'« inspection forte » de 2015, avec le confortement des responsables d'unité, qui peinent effectivement à trouver leur place, tandis que le second correspondait à l'évolution de l'organisation territoriale de l'État, avec l'installation de secrétariats généraux communs qui fonctionnent, quant à eux, selon une logique très horizontale. Nous devons concilier la ligne hiérarchique propre au SIT, qui est régie par la convention de l'Organisation internationale du travail – et le fonctionnement horizontal que j'évoquais. Un certain nombre d'irritants très techniques ont été identifiés, qu'ils concernent les équipements de protection individuels ou les voitures de fonction, qui compliquent la réponse sur les moyens.

Les moyens support ne relèvent pas du programme de l'inspection, mais de programmes généraux interministériels. Nous devons y répondre. Cela compte au nombre des sujets que nous aborderons demain en comité technique ministériel, comme la répartition de l'enveloppe liée à l'IFSE. Un rapport de l'Igas porte sur le rôle des responsables d'unité de contrôle et une réunion de restitution sera prochainement organisée au profit des représentants syndicaux de l'inspection du travail et plus largement du ministère.

Je passe sur les questions relatives aux systèmes d'information et aux difficultés d'interconnexion : je sais les témoignages dont vous avez eu connaissance au cours de vos auditions.

Je dirai, pour finir, qu'au sein du programme 155, les crédits de l'ensemble des fonctions support seront en augmentation de 18 %. Indépendamment des questions matérielles que j'évoquais, ceci traduit notre volonté de résorber la vacance. S'il faut que nous adaptions l'organisation pour faire en sorte que l'inspection retrouve sa pleine efficacité en matière de contrôle et de conseil sur le droit du travail, nous le ferons.

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