Intervention de Paul Christophe

Séance en hémicycle du jeudi 2 mai 2024 à 9h00
Améliorer le repérage et l'accompagnement des personnes présentant des troubles du neurodéveloppement et favoriser le répit des proches aidants — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaul Christophe, rapporteur de la commission des affaires sociales :

Au préalable, je tiens à saluer la sénatrice à l'origine de cette proposition de loi, Jocelyne Guidez, qui nous fait l'honneur d'être présente, avec son équipe, dans les tribunes.

Rappelons que cette proposition de loi est la troisième que nous avons le plaisir d'examiner. Les deux précédentes ayant été adoptées à l'unanimité, je souhaite un destin tout aussi favorable à cette troisième proposition de loi, qui n'est sans doute pas la dernière.

Ce jour vient concrétiser une parole politique, une envie d'agir pour les autres et un engagement tenace au service des personnes les plus fragiles. Après le Sénat, qui l'a adoptée à l'unanimité en première lecture le 25 janvier, notre assemblée s'apprête à examiner la proposition de loi visant à améliorer le repérage et l'accompagnement des personnes présentant des troubles du neurodéveloppement et à favoriser le répit des proches aidants.

Son examen en commission des affaires sociales nous a permis de nous constater que certains enjeux nous rassemblent encore aujourd'hui, malgré le caractère hétéroclite de notre assemblée, où les dissensions sont coutumes. Comme à son habitude, sur ces questions, notre commission a mené un travail rigoureux et collectif, que je me dois de souligner.

J'ai l'impression que c'était hier que les journalistes m'interrogeaient sur le sens du mot « aidant ». Pourtant, que de chemin parcouru, en quelques années, pour la reconnaissance des droits des personnes handicapées et de leurs proches !

Qu'ils appartiennent à une opposition comme à la majorité, les parlementaires ont déposé de nombreuses propositions de loi visant à faire changer les mentalités et à simplifier le parcours semé d'embûches des personnes handicapées, en raison de démarches administratives superflues et excluantes. Sans orgueil ni suffisance, je crois que nous pouvons honnêtement être fiers du travail que nous avons réalisé, et que nous continuons de réaliser.

Cette proposition de loi se situe dans la continuité du travail parlementaire et gouvernemental précédemment mené, avec notamment Agir pour les aidants, la stratégie de mobilisation et de soutien 2023-2027 – qui était une première – ou encore les recommandations de la Conférence nationale du handicap et du comité interministériel du handicap. Comme le montrent les trois titres du texte, elle a pour objectif d'améliorer les conditions de scolarisation des enfants présentant des troubles du neurodéveloppement, d'établir un repérage précoce de ces troubles, enfin de soutenir les proches aidants des personnes âgées ou handicapées.

Pour renforcer, avec l'appui du secteur médico-social, les capacités d'accueil en milieu ordinaire des enfants et des adolescents présentant un trouble du neurodéveloppement, l'article 1er prévoit que le 1er septembre 2027 au plus tard, chaque circonscription académique métropolitaine et chaque académie d'outre-mer, pour l'enseignement primaire, et chaque département, pour l'enseignement secondaire, devront disposer d'au moins un dispositif dédié à la scolarisation de ces jeunes.

Tout en tenant compte du temps nécessaire au bon déploiement de ces dispositifs, l'article 1er vise donc à donner un coup d'accélérateur à notre politique d'inclusion. Les dispositifs dédiés font déjà l'objet d'une attention accrue, mais nous pouvons – et nous devons – faire mieux. Tel est le sens de cet article, qui prévoit d'augmenter le nombre de dispositifs créés.

La formation des personnels des écoles et des établissements scolaires revêt aussi une importance déterminante pour la qualité de l'accueil de ces enfants. C'est pourquoi l'article 2, adopté sans modification par notre commission, tend à renforcer la formation des équipes pédagogiques en l'élargissant aux enjeux spécifiques liés aux TND. La commission a également décidé de maintenir la suppression de l'article 3, qui visait à favoriser la formation des professionnels de santé sur les enjeux relatifs aux TND, partageant ainsi l'analyse du Sénat. En effet, la formation prévue par l'article existe déjà depuis la publication de l'arrêté du 7 septembre 2022 définissant les orientations pluriannuelles prioritaires de développement professionnel continu pour les années 2023 à 2025. Il importe désormais de mieux la faire connaître et d'en favoriser l'accès à un plus grand nombre de professionnels.

Dernier article de ce titre, l'article 4 défend, en quelque sorte, la politique du « dites-le nous une fois par cycle pédagogique ». En effet, même si les délais de traitement des dossiers gérés par les MDPH se réduisent, ils restent trop importants. Pour diminuer l'engorgement des services des MDPH, qui doivent faire face à un flux continu de demandes, les bonnes pratiques doivent être généralisées. Tel est l'objectif de cet article, qui prévoit que la notification des mesures propres à assurer l'inclusion scolaire des enfants vaudra pour la durée d'un cycle pédagogique, et non plus pour un ou deux ans, comme c'est encore parfois le cas ; cela permettra d'améliorer l'accès aux droits des personnes handicapées, objectif partagé par l'État et par les départements. L'article prévoit en outre que les professionnels de santé associés au bilan et au diagnostic des troubles de santé à caractère durable et invalidant seront informés des délais nécessaires aux commissions pour décider des mesures propres à assurer l'inclusion scolaire de ces enfants.

J'en viens au titre II, qui se concentre sur le repérage des TND. S'appuyant sur les recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS), l'article 5 indique que ce repérage prend en considération la prématurité et les facteurs de risques qui y sont associés, et précise que le service de repérage, de diagnostic et d'intervention précoce s'appuie non seulement sur les examens obligatoires de l'enfant – dont ceux créés à l'article 6 –, mais aussi sur d'éventuels examens complémentaires justifiés par les facteurs de risques identifiés.

Si le code de la santé publique prévoit la tenue de vingt examens médicaux obligatoires pour les enfants entre leur naissance et leur majorité, aucun, pour l'heure, n'est spécifiquement dédié au repérage des TND, alors même que, dans notre société, un enfant sur six serait concerné par ces troubles. Les textes prévoient bien que ces examens portent notamment sur la surveillance du développement neurodéveloppemental de l'enfant, mais celle-ci s'effectue en parallèle de nombreux autres objectifs et, en pratique, le médecin ne peut pas toujours y consacrer le temps adéquat pour mener un repérage efficace. En créant des examens dédiés pour l'ensemble des enfants, qu'ils présentent ou non des facteurs de risques, notre objectif est donc d'assurer un repérage plus précoce des troubles du neurodéveloppement pour mieux accompagner les enfants et leurs familles. Vous comprendrez ainsi mon ferme attachement à l'article 6, qui prévoit la création de deux examens médicaux obligatoires consacrés au repérage des TND, fixés aux 18 mois puis aux 6 ans de l'enfant – des âges clés pour son développement neurologique.

Enfin, l'article 7, unique article du titre III, pérennise les dispositifs de relayage du proche aidant d'une personne âgée ou handicapée, qui faisaient l'objet d'une expérimentation dans le cadre de l'article 53 de la loi pour un État au service d'une société de confiance. Comme vous avez pu le lire dans le rapport de la direction générale de la cohésion sociale (DGCS), qui, comme je vous l'avais promis, vous a été transmis la semaine dernière, l'évaluation de ce dispositif, qui satisfait les aidants, leurs proches et les salariés des établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESMS) mobilisés, justifie sa pérennisation.

Pour répondre aux doutes émis par certains de nos collègues en commission, je tiens à rappeler que ces dispositifs, qui visent à répondre aux besoins spécifiques du proche aidant d'une personne nécessitant une surveillance permanente et qui vivrait avec souffrance la succession de plusieurs personnes extérieures dans son domicile, fonctionnent grâce à des dérogations exceptionnelles au droit du travail qui n'ont pas vocation à être étendues à d'autres situations. De plus, à l'issue de l'expérimentation, 98 % des intervenants ont déclaré en être « plutôt satisfaits » ou « tout à fait satisfaits », notamment s'agissant de la nouvelle organisation du temps de travail que la réalisation des prestations implique. Notre commission a adopté plusieurs amendements de notre collègue Annie Vidal et moi-même visant, en particulier, à supprimer la possibilité, pour les ESMS, d'intervenir en mode mandataire, et à reporter l'entrée en vigueur de l'article 7 au 1er janvier 2025, afin de prévenir toute insécurité juridique entre la fin de l'expérimentation et la pérennisation du dispositif. D'autres modifications pourront être apportées au texte afin de mieux encadrer encore ces dispositifs à l'avenir.

Pour répondre à une critique que j'ai entendue à de nombreuses reprises en commission – et je m'attends à l'entendre à nouveau en séance publique –, je répète que cette proposition de loi est à dimension parlementaire et ne répond donc pas à l'ensemble des problématiques liées aux TND. Elle présente cependant de réelles avancées, utiles au quotidien des familles, et cela suffit largement à me convaincre de l'intérêt de la voter, et des deux mains ! Je me laisse le temps des débats pour tenter de vous convaincre de faire de même.

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