Intervention de Anne Bouverot

Réunion du mardi 26 mars 2024 à 18h00
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Anne Bouverot, co-présidente de la Commission de l'intelligence artificielle :

. – Nous avons formulé 25 recommandations. Je reviendrai sur 7 d'entre elles, qui nous paraissent particulièrement importantes.

La première serait de créer les conditions d'une appropriation collective de l'IA, en lançant un plan de sensibilisation et de formation à l'échelle de la nation. Dans le cadre de la révolution de l'IA, au-delà des métiers à risque et des métiers à créer, beaucoup de tâches et de métiers sont appelés à se transformer. Il conviendra donc d'agir sur la formation continue. Il faudra également former davantage de personnes à l'IA dans le cadre de la formation initiale, en veillant à associer l'IA aux grands domaines de formation : droit, histoire, finance, etc. Nous aurons également besoin d'un plan de sensibilisation de tous les citoyens et tous les élèves, dès l'école maternelle, à la compréhension des enjeux de l'IA, par exemple pour développer chez eux un esprit critique face aux images générées par l'IA, dans une optique de lutte contre la désinformation.

La deuxième recommandation serait d'investir massivement dans les entreprises du numérique et dans la transformation des entreprises, quelle que soit leur taille, pour soutenir l'écosystème français et préserver sa compétitivité. Pour ce faire, la proposition serait de créer un fonds dédié « France et IA ».

La troisième recommandation serait de faire de la France et de l'Europe un pôle majeur de la puissance de calcul, à court et à moyen termes. L'IA et les grands modèles de langage reposent sur énormément de puissance de calcul et de données. Le sujet de la puissance de calcul est donc fondamental.

La quatrième recommandation serait de transformer notre approche de la donnée personnelle, pour pouvoir à la fois continuer à protéger nos concitoyens, en confortant le rôle de la Cnil et du RGPD, tout en étant capables de soutenir l'innovation au bénéfice de tous, dans le domaine de la santé notamment.

La cinquième recommandation serait, dans le cadre du développement de l'IA dans le domaine de la culture et des industries créatives, d'assurer le rayonnement de la culture française, pour éviter que les modèles d'IA soient entraînés principalement sur des données et de la culture anglo-saxonnes. À cet égard, les données de l'Institut national de l'audiovisuel (INA) représentent déjà 100 fois plus que les données du common crawl utilisé pour l'entraînement des modèles et résultant du balayage de l'internet. Ces données ont une valeur quantitative et qualitative importante, qu'il faut mobiliser.

La sixième recommandation serait de conduire une expérimentation dans le domaine de la recherche publique autour de l'IA, pour améliorer les conditions de travail de nos chercheurs et éviter une fuite de nos talents, notamment vers les grandes entreprises américaines, celles-ci offrant aujourd'hui des conditions de travail et de rémunération incomparables.

Enfin, la septième recommandation serait de structurer une initiative diplomatique internationale cohérente pour promouvoir une gouvernance mondiale de l'IA. À cet égard, l'accueil par la France du prochain sommet mondial de l'IA pourrait représenter une opportunité.

Au-delà de ces recommandations, nous sommes convaincus que notre capacité à nous différencier dans le domaine de l'IA dépendra de notre capacité à prendre aussi en compte les enjeux environnementaux associés. Il nous faudra faire preuve de transparence vis-à-vis des impacts environnementaux de l'IA et favoriser le développement de solutions et de modèles d'IA portant une attention spécifique à ces enjeux : consommation énergétique, consommation d'eau, frugalité, etc.

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