Intervention de Gabriel Attal

Séance en hémicycle du mercredi 13 juillet 2022 à 15h00
Règlement du budget et approbation des comptes de l'année 2021 — Présentation

Gabriel Attal, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics :

Je m'associe à l'hommage que vous venez de rendre à cet homme, en exprimant ma solidarité, celle du Gouvernement, à sa famille et à ses collègues. Je salue également tous ceux qui travaillent à l'Assemblée nationale et font vivre notre démocratie au quotidien.

À l'échelle mondiale, 2021 a été une année de montagnes russes dans le domaine sanitaire, avec des conséquences en chaîne qui ont affecté la production, l'approvisionnement et, donc, les prix.

Dans cet environnement marqué à la fois par la reprise et par l'instabilité, l'examen de l'exécution budgétaire illustre les trois principes qui guidaient et guident encore notre action : protéger, relancer, maîtriser.

En 2021, l'économie française a connu une croissance de 6,8 %, supérieure de 1,4 points à la croissance moyenne de l'Union européenne, ce dont nous devons nous féliciter. Cette reprise fait suite à une très forte récession en 2020, liée à la crise du covid et aux mesures que, comme partout dans le monde, nous avons dû prendre, avec pour effet de mettre l'économie à l'arrêt.

Toutefois, 2021 n'a pas uniquement été l'année du rebond : plusieurs dérèglements sont intervenus au fil des mois. Certains sont liés aux résurgences épidémiques – notamment la vague du variant omicron à l'automne –, d'autres à la reprise elle-même, en raison d'un phénomène de surchauffe économique. Ces dérèglements ont eu pour conséquence de nous faire redécouvrir le fléau de l'inflation ; pour protéger les Français, nous le combattons vigoureusement.

En effet, les tensions inflationnistes ne datent pas de l'invasion de l'Ukraine, mais de l'automne 2021. Or face à cette nouvelle donne, le Gouvernement a réagi sans tarder. Blocage des prix du gaz et de l'électricité ; indemnité inflation de 100 euros versée à 38 millions de personnes ; chèque énergie exceptionnel : ces mesures fortes, prises très tôt, parfois dès septembre ou octobre 2021, nous ont permis de contenir les hausses de prix qui grèvent le portefeuille des Français et de connaître un taux d'inflation inférieur de deux points à celui de la moyenne européenne.

Bien sûr, certaines de ces mesures ont eu une incidence directe sur les finances publiques de l'année 2021. C'est la raison pour laquelle un second projet de loi de finances rectificative a été présenté en novembre dernier. Il visait notamment à ouvrir 3,8 milliards d'euros de crédits de paiement pour financer l'indemnité inflation, et 600 millions d'euros pour le chèque énergie exceptionnel. Face à l'envolée des prix, celui-ci a été versé à 5,8 millions de ménages modestes en décembre.

Voilà un aperçu de l'environnement dans lequel nous avons évolué en 2021, et des menaces que nous avons dû affronter. Tout au long de cette année, les trois principes que j'évoquais précédemment ont guidé notre action.

D'abord, nous voulons protéger. En 2021, nous avons poursuivi l'effort consenti pour contrer les effets de la crise liée au covid, en adaptant constamment nos dispositifs au contexte sanitaire et économique, notamment grâce à deux lois de finances rectificatives. Adoptées en juillet et novembre, elles ont ouvert près de 11,5 milliards d'euros de crédits supplémentaires.

Permettez-moi de partager avec vous un constat : les effets des mesures de protection sanitaire, assorties de restrictions d'activité, auraient été plus néfastes encore pour l'économie et les finances si nous ne les avions pas contrés avec de puissants mécanismes de soutien. Je pense notamment au fonds de solidarité et à l'activité partielle, que nous avons su mettre à disposition des acteurs économiques au bon moment, pour ensuite les alléger progressivement puis les faire disparaître à mesure que la vaccination et le passe sanitaire nous permettaient de lever les restrictions. Je pense également aux mesures visant à protéger le pouvoir d'achat, comme le financement d'une indemnité inflation de 100 euros, versée à 38 millions de Français, ou la prolongation pour les étudiants boursiers du dispositif de ticket de restaurant universitaire à 1 euro, instauré à la rentrée 2020.

Sur le budget de l'État, 34,4 milliards d'euros de crédits ont été mobilisés l'année dernière au titre de la mission "Plan d'urgence face à la crise sanitaire" . Composée de quatre programmes, elle a permis de financer l'activité partielle, le fonds de solidarité pour les entreprises, le renforcement des participations de l'État au capital d'entreprises publiques fragilisées par la crise, la compensation à la sécurité sociale des allègements de prélèvements pour les entreprises les plus touchées par la crise sanitaire et l'achat de matériel sanitaire pour affronter la pandémie.

Je citerai quelques chiffres pour illustrer la manière dont les dispositifs ont évolué au gré du contexte sanitaire et de la situation économique. S'agissant de l'activité partielle, le retour progressif au droit commun s'est traduit par une baisse significative du nombre d'entreprises bénéficiaires du dispositif. Au cours de l'année 2021, près de 500 000 entreprises y ont eu recours, contre un peu plus de 1 million lors du premier confinement, en 2020.

Le mécanisme du fonds de solidarité traduit l'effort sans précédent consenti en 2021 pour répondre aux besoins des entreprises touchées par la crise sanitaire et pour mieux cibler les aides visant à offrir une compensation aux grandes entreprises dont les coûts fixes sont particulièrement importants, ou encore à celles soumises à une forte saisonnalité – on se souvient notamment du soutien massif aux acteurs de la montagne. En 2021, près de 27 milliards d'euros ont été exécutés dans le cadre du programme Fonds de solidarité pour les entreprises à la suite de la crise sanitaire.

S'agissant des prêts garantis par l'État, les fameux PGE, l'engagement de l'État se montait le 31 décembre dernier à 93 milliards d'euros, connaissant une légère baisse par rapport à fin 2020, lorsqu'il atteignait 100 milliards. Cette diminution est liée, d'une part, aux remboursements intervenus et, d'autre part, à la diminution du montant de la provision pour risque d'appel en garantie, compte tenu de la nette amélioration de la situation financière des entreprises bénéficiaires.

Nous voulions donc protéger d'abord, relancer ensuite. À cet égard, l'année 2021 a été placée sous le signe de la relance ; l'exécution budgétaire que nous vous soumettons en atteste. L'enjeu, en effet, n'était pas uniquement de parer à l'urgence : il s'agissait de préparer l'avenir. C'est ce que nous avons fait. L'État s'est montré protecteur, mais aussi stratège, avec un plan de relance doté de 100 milliards d'euros, entré en vigueur à l'été 2020.

Je souligne la célérité de sa mise en œuvre et les résultats obtenus. Oui, nous avons su aller vite, comme en témoignent les niveaux d'engagement et de décaissement atteints fin 2021 – respectivement 72 et 42 milliards d'euros. C'est bien davantage que ce que nous anticipions lors de la présentation du plan de relance.

Je veux également mettre en valeur certaines réalisations. Je sais que chacun d'entre vous, dans sa circonscription, en mesure les effets très concrets dans la vie des Français, dans les entreprises et dans les collectivités locales.

En matière de transition énergétique, d'abord. Sur l'ensemble de l'année, 765 000 ménages ont demandé à bénéficier de MaPrimeRénov' pour améliorer l'efficacité énergétique de leur logement.

En matière de compétitivité, ensuite. En 2021, environ un tiers des entreprises industrielles françaises ont été soutenues, notamment à travers les dispositifs Industrie du futur – près de 7 900 entreprises bénéficiaires fin 2021, dont 90 % de TPE (très petites entreprises) et de PME (petites et moyennes entreprises) – et Territoires d'industrie – plus de 1 300 projets lauréats fin 2021.

En matière de cohésion, enfin. L'année dernière, 4 millions de jeunes ont directement bénéficié du plan « 1 jeune, 1 solution », notamment grâce à l'aide exceptionnelle aux employeurs d'apprentis, qui a permis un flux d'entrées en apprentissage d'un niveau inédit : plus de 732 000 jeunes fin 2021. Partout sur le territoire, dans chacune des circonscriptions, des chefs d'entreprise, des artisans, des commerçants, des patrons de PME et de TPE saluent ce soutien massif à l'apprentissage.

Ces politiques ont puissamment contribué à la reprise de l'activité l'année dernière, permettant à la France d'être le seul grand pays européen à avoir retrouvé son PIB d'avant-crise dès le 3e trimestre 2021. Certains évoqueront sans doute un simple effet de rattrapage après la contraction exceptionnelle du PIB constatée en 2020. Personne ne le nie, mais admettons ensemble que son ampleur et sa rapidité – il est très nettement en avance sur les prévisions – tiennent largement aux mesures de protection que nous avons appliquées.

Maîtriser, enfin, car des comptes bien tenus sont la condition sine qua non pour atteindre nos objectifs – lesquels, bien au-delà des raisonnements financiers, consistent à garantir notre indépendance, notre souveraineté et notre capacité à agir. Alors qu'il atteignait 8,9 % du PIB en 2020, le déficit public a été de 6,4 % en 2021. Cette amélioration résulte largement du rebond de l'activité économique, que l'INSEE a évalué fin mai à 6,8 %. Le « quoi qu'il en coûte », qui s'est imposé aussi longtemps que la situation économique l'exigeait, a, là encore, joué un rôle décisif. Parce qu'ils savaient que l'État se tenait à leurs côtés, les ménages ont consommé et les entreprises ont sauvegardé l'emploi et investi.

Premier point, la croissance a été forte parce que les acteurs économiques ont compris que la puissance publique jouait pleinement son rôle d'amortisseur. Second point, la très bonne dynamique du marché du travail tient bien sûr à la croissance, mais aussi aux réformes structurelles que nous avons conduites en matière d'assurance chômage, de formation professionnelle ou de renforcement de la compétitivité des entreprises. Ainsi, au 4e trimestre 2021, le taux de chômage a atteint 7,4 %, son plus bas niveau depuis 2008.

L'année 2021 doit donc apparaître comme une première étape sur le chemin qui doit nous conduire à ramener le déficit public sous la barre des 3 % du PIB en 2027. C'est à notre portée ; rappelons-nous que nous avions atteint cet objectif juste avant la crise du covid. Cette dynamique de maîtrise des comptes a d'ailleurs été enclenchée l'année dernière avec un reflux du déficit et des recettes fiscales plus élevées que prévu. Nous entendons évidemment la poursuivre durant le quinquennat, tout en maintenant les protections indispensables pour les Français les plus affectés par la hausse des prix.

Le déficit public, je l'ai dit, est passé de 8,9 % à 6,4 % en 2021. Malgré cette amélioration significative, largement soutenue par le rebond de l'activité, le solde public reste cependant dégradé par le financement des mesures de soutien et d'investissement que j'ai rappelées.

Le solde budgétaire s'établit à moins 170,7 milliards en 2021, en légère amélioration – de 2,5 milliards – par rapport à la loi de finances initiale pour 2021. Cela résulte notamment d'une hausse des recettes de 37,9 milliards par rapport à la loi de finances initiale. Cette nette augmentation s'explique principalement par la reprise de l'activité économique en fin de 1er semestre, qui se manifeste par des recettes supplémentaires apportées par l'impôt sur les sociétés – 15,3 milliards en plus par rapport à ce qui était prévu –, la TVA – 10 milliards en plus – et l'impôt sur le revenu – 5,4 milliards en plus –, signe, là aussi, du redémarrage de l'activité économique.

Les années qui viennent ne peuvent être celles du laisser-aller budgétaire. Autrement dit, nous sommes passés de l'ère du « quoi qu'il en coûte » à celle du « combien ça coûte ». Comme l'a annoncé le Président de la République, l'objectif est de ramener le déficit public sous les 3 % en 2027.

Quant à la dette des administrations publiques, elle a été ramenée à 112,5 % du PIB en 2021, après avoir atteint son plus haut niveau historique en 2020 – 114,6 %. L'objectif est de la stabiliser en 2026, pour la réduire ensuite de façon graduelle. Pourquoi faut-il ramener le déficit en deçà des 3 % de notre richesse nationale et stabiliser la dette ? Non pas parce que ce chiffre serait un totem, non pas pour nous soumettre à je ne sais quel diktat, mais d'abord parce qu'une grande nation honore ses engagements. Nous avons des engagements à l'égard de nos partenaires et c'est une partie de notre crédibilité qui est en jeu.

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