Intervention de Roland Lescure

Séance en hémicycle du jeudi 4 avril 2024 à 9h00
Protéger la population des risques liés aux pfas — Présentation

Roland Lescure, ministre délégué chargé de l'industrie et de l'énergie :

Évidemment, nous n'attendrons pas que les 5 000 – voire 12 000 – Pfas existants soient examinés pour prendre des décisions : à chaque fois que le comité compétent identifiera des Pfas comme dangereux, nous en tirerons les conséquences, soit en prononçant des interdictions sectorielles, soit en régulant les flux ou les usages des produits concernés. Les interdictions sectorielles seront prévues dans tous les règlements européens en cours de discussion, comme l'illustre d'ailleurs l'adoption récente du principe d'interdiction des Pfas dans les emballages alimentaires dès 2026. Nous nous engageons à procéder de la même façon pour les règlements relatifs aux jouets, aux cosmétiques, ou encore aux textiles, à mesure que les connaissances scientifiques progresseront. Cette démarche n'empêche nullement les filières de s'engager également, ce que certaines font d'ailleurs. Cet engagement à agir à l'échelle européenne est public : il figure dans le plan d'action relatif aux Pfas dévoilé aujourd'hui par le Gouvernement.

Le second point, tout aussi important, consiste à réduire les pollutions de l'environnement – ce que j'appelais tout à l'heure les stocks et les flux de rejets. Ce travail – réduire les rejets de Pfas, dépolluer les écosystèmes, assurer la qualité de l'eau potable – relève de la responsabilité nationale. Il a d'ailleurs été lancé dès 1998, par le biais d'un arrêté du 2 février établissant une valeur limite de concentration de 25 microgrammes par litre dans les eaux rejetées en milieu naturel, complété par l'ordonnance du 22 décembre 2022 relative à l'accès et à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine, qui généralise la réalisation d'un diagnostic Pfas.

Nous avons accéléré cette démarche depuis 2023, à travers le plan ministériel lancé en janvier 2023 en vue de mesurer les impacts des Pfas sur 5 000 installations classées et, plus largement, sur l'ensemble des prélèvements d'eau. Ces contrôles, effectués par les industriels, les agences régionales de santé (ARS) et la direction générale de la prévention des risques (DGPR), permettront de dresser un diagnostic des contaminations. Le bilan de cette campagne sera bientôt connu et je m'engage à faire la pleine transparence sur ses résultats. Dès qu'ils seront consolidés – lorsque les trois mesures distinctes effectuées sur chaque site auront été effectuées –, ils seront publiés sur les sites internet des directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal). Les premiers résultats disponibles en Auvergne-Rhône-Alpes permettent déjà de dresser un constat important : l'origine des contaminations n'est pas seulement industrielle, les aéroports étant une source majeure de pollution aux Pfas à travers les mousses utilisées dans le cadre des exercices anti-incendie.

Le plan interministériel d'action sur les Pfas, publié aujourd'hui par le Gouvernement, rassemble les actions déjà existantes en les complétant. Élaboré par les ministères chargés de la transition écologique, du travail et de la santé, de l'intérieur, de l'agriculture, des armées, et de la recherche, il permettra de coordonner toutes les administrations pour étendre la campagne de mesures, réduire les rejets le plus vite possible et dépolluer l'environnement, à travers vingt-six actions qui seront chacune confiées à une administration pilote, afin de responsabiliser les acteurs. Bercy, par exemple, sera chargé du contrôle systématique des Pfas interdits dans les produits importés par les douanes – contrôles que les services assurent évidemment déjà pour les PFOA et les Pfos, interdits au niveau européen. Le directeur général de la prévention des risques et le directeur général de la santé feront un rapport régulier aux ministres concernés.

Concrètement, ce plan comporte trois mesures phares. En premier lieu, des arrêtés préfectoraux seront pris pour réduire au plus vite les rejets industriels au minimum techniquement réalisable, sur la base à la fois des mesures des rejets de 5 000 installations industrielles et des travaux de l'Echa, au niveau européen, et de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), au niveau national.

En second lieu, des dispositifs de traitement des Pfas seront mis en place dans les installations traitées par des mousses anti-incendie, notamment les aéroports.

En troisième et dernier lieu, il prévoit, le cas échéant, la dépollution des Pfas par les collectivités avec le soutien des agences de l'eau.

Pour protéger nos concitoyens, le Gouvernement agit donc dans les deux dimensions de la lutte contre les polluants éternels, et ce dans une optique d'efficacité, c'est-à-dire à l'échelle pertinente pour chaque mesure. Pour encadrer les rejets des installations classées, l'échelle pertinente se situe au niveau du préfet, de l'installation elle-même ou du territoire. Pour interdire ou restreindre la mise sur le marché ou l'usage de produits chimiques, il convient d'agir dans le cadre européen…

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