Intervention de Véronique Louwagie

Séance en hémicycle du jeudi 21 décembre 2023 à 15h30
Motion de censure — Discussion et vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaVéronique Louwagie :

Vous refusez de voir que notre pays croule sous les prélèvements obligatoires dont il est devenu le champion d'Europe incontesté. Vous refusez de voir – M. Éric Coquerel l'a confirmé il y a quelques instants à la tribune – que le dérapage de nos finances publiques devient abyssal, à mesure que notre dette devient insoutenable.

Enfin, fidèles à notre ADN, nous restons une opposition responsable et animée par la seule volonté d'être utile au pays et de défendre les Français.

Cependant, nous déplorons, tout comme vous, les conditions d'examen proprement délétères de ce budget 2024, et la facilité dans laquelle cette majorité est tombée en déposant des 49.3 de plus en plus précoces.

Ce n'est pas le 49.3 en lui-même qui pose un problème, c'est la méthode du Gouvernement, qui a consisté cette année à se servir du 49.3, non seulement pour faire adopter un texte, mais aussi pour faire taire ses oppositions.

Je le dis avec force, le débat aura été interdit, empêché, censuré par votre gouvernement, madame la Première ministre, pendant l'intégralité de cet automne budgétaire. Nous le dénoncerons en saisissant le Conseil constitutionnel.

Rendez-vous compte : nous n'avons débattu d'aucun amendement et nous n'avons pu voter sur aucun des articles de la première partie du PLF, ni en première lecture, ni en nouvelle lecture, ni en lecture définitive. Pas un seul amendement, sur les 5 000 qui avaient été déposés sur la première partie, n'a été soumis au vote. Sur la seconde partie, nous avons examiné seulement sept des vingt-trois missions budgétaires.

Nous n'avons donc pas pu débattre en séance du logement ou de la rénovation thermique, du sort des collectivités territoriales, ni du sujet pourtant majeur de l'inflation qui mine le pouvoir d'achat de nos compatriotes. Nous n'avons pas pu davantage évoquer nos propositions pour baisser les dépenses publiques et rééquilibrer nos comptes. C'est navrant. Quand on met à ce point le Parlement sous cloche, ne vous étonnez pas quand il reprend sa liberté et vous met en échec.

Enfin, sans l'ombre d'une discussion, et sans vote à l'assemblée, certains dispositifs dangereux ont été confirmés par les 49.3. Je pense en particulier à la réduction de l'abattement dont bénéficient les locations touristiques de 71 % à 30 % – je dis bien à 30 % et non à 50 %, suite à une erreur que vous n'avez pas su corriger. C'est un coup de massue pour tous les Français, pour qui la location ponctuelle représente un coup de pouce bienvenu. Il fallait s'attaquer aux professionnels de la location Airbnb en zone tendue, au lieu de quoi vous tapez, une nouvelle fois, sur les propriétaires français.

Monsieur le ministre délégué chargé des comptes publics, vous nous expliquez que « rien ne changera dans l'immédiat » ; j'ose espérer que cet amendement sera rectifié l'année prochaine, avant la déclaration fiscale du printemps 2025.

À l'heure des comptes, et suite aux cinq usages de l'article 49.3 sur ce PLF pour 2024, le solde budgétaire de l'État s'est creusé de 2,4 milliards d'euros. De ce fait, les dépenses passent de 1 575 milliards en 2023 à 1 624 milliards en 2024.

Hélas, tout cela nous confirme qu'il s'agit d'un budget en 3D : dépense, déficit et dette.

Le niveau de la dépense publique reste exorbitant, à 55,9 % du PIB.

Le déficit, à 4,4 % du PIB l'an prochain, ne baisse pas et devient le pire déficit en Europe. Tous les pays de l'Union européenne maintiendront le déficit public en dessous de 3 % de PIB d'ici à 2025 – tous sauf la France. Le Portugal, Chypre, la Croatie et l'Irlande sont déjà en excédent ou à l'équilibre. Le déficit de l'Allemagne, des Pays-Bas et même celui de la Grèce se situent déjà au-dessous de 3 %. L'Espagne y sera en 2024, l'Italie en 2025 et la Belgique en 2026. Tout le monde a pris le train du désendettement, sauf nous. Notre dette continuera donc d'augmenter dangereusement. Avec un nouveau recours à l'emprunt de plus de 285 milliards en 2024, un montant jamais atteint, la France sera le troisième pays le plus endetté d'Europe derrière l'Italie et la Grèce.

Notre dette dépasse les 3 000 milliards d'euros et la charge de la dette explose. Elle était de 31 milliards en 2021 ; elle sera de 57 milliards en 2024 et pourrait dépasser les 81 milliards en 2027. Alors qu'elle deviendra le poste de dépenses le plus important de l'État, songez à tout ce que nous pourrions faire pour les Français avec cet argent.

Enfin, notre taux de prélèvements obligatoires ne baisse toujours pas, contrairement aux promesses présidentielles. Après nous avoir juré la main sur le cœur qu'il n'y aurait pas de nouvelle taxe, vous nous annoncez finalement une taxe supplémentaire sur le streaming musical.

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