Intervention de Francis Claudepierre

Réunion du jeudi 19 octobre 2023 à 9h05
Commission d'enquête sur les causes de l'incapacité de la france à atteindre les objectifs des plans successifs de maîtrise des impacts des produits phytosanitaires sur la santé humaine et environnementale et notamment sur les conditions de l'exercice des missions des autorités publiques en charge de la sécurité sanitaire

Francis Claudepierre, co-président de la Tête de réseaux associatifs pour le développement agricole et rural (Trame) :

Vous voulez savoir pourquoi la politique de réduction des produits phytosanitaires n'a pas fonctionné. Il est tout de même bien plus compliqué de faire la transition en agro-écologie, comme toutes les autres transitions, que de continuer l'agriculture qu'on a connue depuis quarante ans. Les plans d'épandage sont bien plus compliqués à gérer. Et l'on est davantage montré du doigt lorsqu'on épand du compost ou des matières organiques, tout simplement parce que cela se voit plus.

Tout cela ajoute des difficultés à la transition que nous avons choisi de faire. En sachant que ça reste un choix aujourd'hui. Pour progresser dans le choix des transitions, ça se fait beaucoup mieux à plusieurs que tout seul dans son coin. Ceux qui le font seuls sont montrés du doigt comme des agriculteurs un peu différents, y compris par les gens qui sont sensibles aux questions environnementales. Si on n'associe pas les riverains, les voisins, les collaborateurs et, plus largement, tous les gens avec lesquels on vit, si le projet n'est pas partagé, il est d'autant plus difficile à porter.

C'est la raison pour laquelle les jeunes que je vois dans les lycées agricoles ne sont pas partis pour faire des transitions. Il est plus simple pour eux d'envisager les décisions de travail dans quelque chose de tracé et de connu. Aujourd'hui, la transition est volontaire, et non obligatoire. Il faut reconnaître qu'elle n'est pas très incitative. On n'est pas soutenu par les consommateurs. Nous sommes passés en bio il y a vingt ans. Seules 40 % de nos productions sont valorisées en bio à ce jour. Le reste a été déclassé parce qu'il n'y a pas de marché. C'est difficile à vivre lorsqu'on croit en l'avenir de l'agriculture avec les pratiques que nous avons mises en œuvre.

Néanmoins, tout n'est pas si noir. À titre personnel, je voyage beaucoup. Je traverse la France. À bord du train, on a le temps de regarder les champs qui nous entourent. Je vois malgré tout que des pratiques agronomiques se mettent en place. C'est encourageant. Pour autant, la grande dynamique que nous attendons n'est pas encore là. Il s'agit d'éviter que les pionniers ou les visionnaires qui se lancent dans les transitions soient mis à l'index. Ils doivent au contraire être valorisés dans leur démarche, et pas uniquement sur le plan économique.

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