Intervention de Emmanuel Puisais-Jauvin

Réunion du jeudi 9 novembre 2023 à 10h00
Commission d'enquête sur la libéralisation du fret ferroviaire et ses conséquences pour l'avenir

Emmanuel Puisais-Jauvin, secrétaire général des affaires européennes :

La relance du fret ferroviaire est indispensable : c'est la ligne du Gouvernement et le ministre délégué aux transports l'a dit sans aucune ambiguïté. Depuis deux ans, la courbe s'inverse. Les lois adoptées en 2018 et 2019, la loi Climat et résilience et la stratégie nationale pour le développement du fret ferroviaire vont toutes dans le même sens.

Le schéma de discontinuité permet d'envisager un avenir, tout simplement. Sinon, il n'y en aurait pas. Nous verrons comment il fonctionnera concrètement. Le train mutualisé restera au cœur de l'activité de la nouvelle structure. Celle-ci devra renoncer aux trains dédiés, c'est vrai, alors qu'ils sont en forte croissance ; mais le Gouvernement s'est engagé à trouver des repreneurs pour les vingt-trois flux considérés, ce qui est essentiel pour empêcher tout report modal.

La discontinuité, à elle seule, ne suffira pas ; pour assurer un avenir meilleur, il est indispensable de déployer le plan de modernisation de 4 milliards d'euros présenté par le ministre délégué. Il faudra ensuite, la Première ministre l'a dit, cesser de faire du fret une variable d'ajustement. Dans d'autres pays, la part modale du fret ferroviaire est bien supérieure, parce qu'ils ont consenti les investissements nécessaires ; certes, ceux-ci sont souvent plus lourds en France qu'en Allemagne par exemple, pour des raisons géographiques, mais ils sont indispensables.

Vous dites que la discontinuité s'impose à nous. Ce n'est pas la Commission qui nous l'impose, mais le droit de l'Union : nous n'avons pas d'autre option aujourd'hui pour garantir un avenir au fret ferroviaire.

J'ajouterai que l'accompagnement de ce dernier est aussi lié à l'action du Gouvernement, qui revêt une importante dimension européenne, en faveur d'un profond renouvellement de la politique industrielle. Ce n'est plus un tabou à Bruxelles, comme cela a longtemps été le cas : la croissance s'y résumait à un enjeu de marché intérieur, à un travail sur les quatre libertés fondamentales. Quand la France expliquait que la croissance dépendait aussi de la politique industrielle – c'est-à-dire de la volonté de se doter des moyens financiers de réaliser des investissements et surtout d'imprimer une orientation politique pour devenir performant dans tel ou tel domaine, développer une offre industrielle au lieu de dépendre d'offres extérieures à l'Union et de rester simplement des consommateurs –, elle n'était pas toujours audible. Depuis l'agenda de Versailles, élaboré sous la présidence française dans le contexte de l'invasion russe de l'Ukraine, la volonté d'agir au niveau de l'Union européenne est bien plus présente. Plusieurs textes législatifs en cours de discussion le montrent. Le déclin du fret a été corrélé à la désindustrialisation : il faut poursuivre avec la plus grande détermination, comme le souhaitent nos autorités politiques, cet agenda industriel, à l'échelle française comme européenne. C'est la condition de cet avenir meilleur que, comme vous, j'appelle de mes vœux.

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