Intervention de Hubert Wulfranc

Réunion du jeudi 9 novembre 2023 à 10h00
Commission d'enquête sur la libéralisation du fret ferroviaire et ses conséquences pour l'avenir

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHubert Wulfranc, rapporteur :

Vous avez indiqué que les échanges nourris entre le SGAE et la Commission européenne concernant, depuis plusieurs années, ce sujet particulier avaient connu une pause durant la période du covid. Vous n'étiez pas secrétaire général des affaires européennes à l'époque, mais peut-être votre prédécesseur vous a-t-il donné des indications. Ne pensez-vous pas que cette pause résultait certes de la situation de crise, à l'échelle européenne notamment, mais aussi et surtout de la stratégie politique du gouvernement français du temps où M. Djebbari était ministre délégué chargé des transports ? Celui-ci nous a clairement expliqué qu'il avait instauré une ligne politique de résistance vis-à-vis de la Commission européenne.

Du point de vue chronologique, je distingue trois séquences. De début 2017 à fin 2019, dans le cadre de la filialisation de Fret SNCF, les autorités françaises ont réfléchi à la solution de la discontinuité – on peut se demander si cette approche n'était que théorique. De la fin 2019 jusqu'à mai 2022, la parole politique a rompu avec le scénario de la discontinuité, dans le cadre d'une crise du fret qui a fait naître une politique publique conduite par M. Djebarri. Enfin, à partir de juillet 2022, il y a eu une accélération et la discontinuité est largement revenue dans les discussions entre le gouvernement français et la Commission européenne. Ne vous a-t-on pas dit ou n'avez-vous pas eu le sentiment que la pause que vous avez mentionnée s'expliquait davantage par des considérations politiques que par des contingences strictement techniques liées au covid ?

Vous avez également rappelé qu'un schéma de discontinuité, cela se construisait. Arrivé à la tête du SGAE en juillet 2022, vous avez pris connaissance du dossier à l'été et au début de l'automne. Vous disposiez d'un historique, mais vous avez indiqué que l'étude de McKinsey ne vous était pas connue. Si vous n'avez pas puisé dans ce travail préalable considérable – ni dans cette étude, ni dans les travaux qu'avaient probablement menés les ministères des transports et des finances –, sur quels éléments vous êtes-vous fondé pour bâtir un plan de discontinuité en quelques mois, avec l'aide, j'imagine, de la DGITM et peut-être de l'APE ?

À plusieurs reprises, vous avez fait référence à des échanges « informels ». Disposez-vous néanmoins, par exemple grâce au travail d'interface dont vous avez dit qu'il était votre mission, d'éléments formels relatifs à la préparation ou à la conclusion des travaux portant sur l'évolution de la situation de Fret SNCF ? Il nous a été indiqué que les réunions avec la Commission européenne faisaient l'objet de comptes rendus validés par les deux parties. Si vous en disposez, pourrez-vous nous communiquer les relevés de conclusions de ces rencontres ?

Dans sa décision d'ouverture d'une enquête approfondie, la Commission européenne indique, parmi les reproches faits à la France, qu'elle craint la non-conformité des aides internes ayant permis de combler les déficits de Fret SNCF à partir de 2007 – je dis bien à partir de 2007, c'est-à-dire au cœur même d'une séquence pendant laquelle, aux termes de l'accord de 2005, la France et l'Union européenne étaient censées échanger des éléments d'audit et de contrôle permettant aux deux parties d'apprécier le bon déroulement du plan de restructuration, lequel prévoyait un tel reporting jusqu'à fin 2008. Or, dans sa réponse adressée à la Commission en avril 2023, la France ne s'est pas étonnée que Bruxelles n'ait pas assumé, dès 2007, sa responsabilité de contrôle de ces fameuses aides intragroupe. La direction générale de la concurrence nous a indiqué que le reporting devait cesser à la fin de l'année 2008 et que, par la suite, elle n'avait pas eu les moyens de contrôler le respect de l'accord. Il y a quelque chose qui m'échappe… Aurait-on laissé les choses se faire sans que soient réunis les moyens ni les conditions de transparence nécessaires au contrôle du respect de l'accord de 2005 ? Quel est votre sentiment ?

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