Intervention de Bertrand Sorre

Réunion du mardi 7 novembre 2023 à 17h15
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBertrand Sorre :

La proposition de loi relative à la restitution des restes humains appartenant à des collections publiques pose les bases d'une meilleure gestion de ces restitutions. En effet, cette loi-cadre vise à instaurer une procédure spécifique qui permettra de mettre fin aux lois de circonstance, lorsqu'un État fait une demande de restitution. Actuellement, ces restitutions de restes humains sont extrêmement limitées. La procédure est difficile à mettre en œuvre et il est nécessaire de recourir à des lois d'espèce au cas par cas, ce qui n'est pas satisfaisant. Le Parlement s'est d'ailleurs prononcé sur deux lois en faveur de restitutions. La première, votée en 2002, concernait la restitution à l'Afrique du Sud de la dépouille de Saartjie Baartman ; quant à la seconde, elle a été adoptée en 2010, pour restituer vingt têtes maories à la Nouvelle-Zélande.

Cette proposition de loi a donc comme objectif de mettre fin à ces lois de circonstance et d'offrir un cadre juridique clair permettant de répondre aux demandes de restitution. Il est à préciser que les restes humains de nos collections publiques ont bien souvent été acquis de manière illégitime voire violente. Ces biens sont arrivés dans des conditions suspectes et des peuples ont très clairement été lésés. Le texte n'est donc pas seulement technique mais prend aussi en compte ces spoliations. Ces collections sont particulièrement sensibles car elles sont constituées de corps humains ou d'éléments du corps humain. Il est nécessaire de leur offrir un traitement respectueux, digne et décent. Les restes humains ont un statut juridique particulier. Actuellement, le principe d'inaliénabilité fait obstacle à leur restitution. Afin de préserver la dignité humaine, le texte ouvre les restitutions à des fins funéraires, de manière large, en créant une procédure spécifique qui offrira aux États demandeurs un cadre juridique strict. Il permet de déroger au principe d'inaliénabilité des restes humains, tout en garantissant un traitement respectueux et digne de ceux-ci.

L'Australie, Madagascar et l'Argentine ont fait des demandes de restitution, dont la majorité à des fins funéraires. Si la proposition de loi venait à être adoptée, elle pourrait leur profiter. Le texte permettra également une meilleure reconnaissance de la nature particulière de ces biens et une reconnaissance de leur valeur culturelle et cultuelle. Le retour de ces restes humains à des fins funéraires permettra aussi de maintenir la cohésion dans certaines communautés. Les groupes d'humains issus des États demandeurs pourront enfin rendre hommage à leurs défunts et accomplir des cérémonies ou des cultes dans le respect de leurs croyances et de leur culture d'origine.

La restitution des restes humains s'impose comme un dialogue plus poussé et plus respectueux entre les cultures. Cette démarche permettra également à la France d'ouvrir de nouvelles coopérations culturelles et scientifiques. En effet, l'État possède de nombreux restes humains étudiés par la communauté scientifique. Une proportion significative de ces ossements pourrait d'ailleurs faire l'objet de demandes de restitution. Pour finir, cette loi permettra également d'exiger une transparence indispensable du travail scientifique effectué. Pour toutes ces raisons, notre groupe votera en faveur de cette loi-cadre.

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