Intervention de Quentin Le Guillous

Réunion du jeudi 12 octobre 2023 à 9h10
Commission d'enquête sur les causes de l'incapacité de la france à atteindre les objectifs des plans successifs de maîtrise des impacts des produits phytosanitaires sur la santé humaine et environnementale et notamment sur les conditions de l'exercice des missions des autorités publiques en charge de la sécurité sanitaire

Quentin Le Guillous, secrétaire général adjoint des Jeunes agriculteurs (JA) :

Jeunes agriculteurs portent une vision d'avenir. Ces dernières années, nous avons constaté une volonté partagée par les consommateurs, les citoyens et les agriculteurs de réduire, voire d'abandonner l'utilisation de produits phytosanitaires.

Le Gouvernement nous accompagne de manière progressive, mais par l'élaboration de plans tels qu'Écophyto, par des modifications législatives ou par des retraits soudains de produits, sans pour autant proposer de solutions concrètes pour les jeunes. Notre principal sujet de préoccupation est celui de l'installation. Pour encourager les jeunes à s'installer, il est impératif qu'ils aient une vision d'avenir pour leur entreprise. Nous sommes favorables aux plans de sorties des produits, mais ils doivent s'accompagner de solutions pratiques et d'un véritable soutien aux jeunes. Ces plans doivent également être logiques, ils ne doivent pas préconiser une sortie abrupte de l'utilisation des produits phytosanitaires.

Un autre défi pour les jeunes est l'investissement. Lorsqu'ils s'installent, ils sont confrontés à des investissements de plus en plus importants pour moderniser leur exploitation, que ce soit par la mécanisation, par la robotique ou par d'autres alternatives pour sortir des produits phytosanitaires. Ces investissements demandent des ressources financières considérables et les jeunes agriculteurs ne disposent pas des mêmes moyens que les agriculteurs plus âgés. Il est essentiel d'accompagner ces jeunes sur le long terme.

Nous atteignons actuellement à 10 % de la surface agricole utile en agriculture biologique en France. Mais cette année, nous n'arrivons pas à vendre le bio. Pour atteindre un niveau optimal, il faudrait viser seulement 6 % de produits biologiques en France en 2023. Nous sommes ainsi confrontés à une réalité économique, notamment en raison de l'inflation et la crise en Ukraine. Tout le monde est attentif à son porte-monnaie et les consommateurs privilégient parfois des produits alimentaires moins chers, dont les trois quarts sont importés et ne respectent pas le cahier des charges français, qui est bien plus strict que celui de l'Union européenne.

Chez Jeunes agriculteurs, nous sommes convaincus que les solutions françaises sont les meilleures, mais nous souhaitons que l'Europe nous suive. Nous aspirons en effet à des solutions européennes harmonisées, permettant l'échange de produits et denrées alimentaires. Si la sortie des produits phytosanitaires doit avoir lieu en 2050, nous devons savoir comment nous allons valoriser et vendre nos produits.

En outre, nous avons pour mission de nourrir la France et, en partie, le reste du monde. L'hypothèse d'une réduction de 50 % des rendements de l'agriculture française n'est pas incompatible avec la sécurité alimentaire nationale, mais elle soulève des questions en ce qui concerne les exportations vers des pays tiers. Devons-nous adopter une approche strictement française ou bien devons-nous travailler en coopération avec l'Europe, pour harmoniser les lois afin qu'un produit interdit en France le soit aussi en Allemagne et dans d'autres pays européens, plutôt que de laisser perdurer des divergences qui créent une concurrence déloyale ?

Cette concurrence déloyale amoindrit l'attractivité de nos métiers. Nous observons que nos parents trouvent leur travail plus difficile, que la vie économique et sociale sur les exploitations devient de plus en plus complexe. Si nous voulons attirer de nouvelles générations vers ces métiers, nous devons leur offrir des perspectives économiques, des conditions de travail décentes ainsi qu'une vie sociale et familiale épanouie. Pour ce faire, nous avons besoin de votre soutien, de celui des syndicats et de l'appui de l'Europe.

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