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Intervention de Éric Girardin

Réunion du mercredi 18 octobre 2023 à 9h30
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉric Girardin, rapporteur pour avis :

Monsieur de Fournas, vous avez été assez virulent, mais en ce qui concerne la taxe sur le GNR, les professionnels de l'agriculture ont négocié des compensations. Les changements seront étalés sur plusieurs années. Ils ont également obtenu une hausse de 40 % des plafonds d'exonération des plus-values professionnelles, un relèvement de celui du régime micro-BA (bénéfices agricoles) ainsi que le versement d'un acompte de 50 % sur le remboursement de la TICPE (taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques).

Il faut donner du temps au temps. En Champagne, les professionnels travaillent, depuis trente ans, sur la mise au point d'un cépage qui produit un raisin qui conserve toutes ses qualités vinicoles tout en résistant à l'oïdium et au mildiou. Il n'est pas question d'opérer des mutations immédiates – ni de remplacer les tracteurs actuels par des tracteurs électriques ! –, mais il est quand même indispensable de donner un tempo, d'agir. Il faut accompagner et laisser du temps.

Concernant les négociations commerciales, sur lesquelles travaille d'ailleurs le président de notre commission, je ne dispose pas d'éléments suffisamment précis pour répondre. Mais les discussions sont en cours et progressent.

Monsieur de Lépinau, l'étalement des droits de mutation est, en effet, une excellente solution, en attendant mieux. J'en avais d'ailleurs fait une recommandation dans mon rapport initial. Bercy travaille aussi sur la valeur de comparaison, à laquelle j'ai fait allusion tout à l'heure. Il faut que l'on arrive à écarter de nos calculs des droits les transactions hors normes, comme il s'en réalise parfois dans de grands vignobles, où des domaines s'achètent à des prix totalement décorrélés des valeurs de marché. Or l'administration fiscale tient compte de ces opérations pour calculer une valeur de référence moyenne : c'est une aberration. J'avais demandé à Gabriel Attal qu'un travail soit mené en amont dans les directions départementales des finances publiques (DDFIP) pour que l'on écarte ces situations hors norme qui faussent les calculs et qui nuisent à nos exploitants – à tel point que certains sont parfois obligés de vendre la pépite de leur patrimoine, contribuant ainsi à alimenter la spéculation foncière.

Il ne s'agit pas, malheureusement, du seul mal dont souffre la terre. Il y a également, en France, des problèmes d'imposition des revenus de fermage et de valorisation du patrimoine foncier. Ainsi, pour une ferme de 70 hectares qui permet de recevoir un revenu de fermage de 15 000 euros brut par an, il ne reste plus que 7 000 euros une fois réglés les impôts sur le fermage, la taxe sur le foncier non bâti et les prélèvements sociaux. De même, nos voisins investissent massivement en France, notamment dans le Nord. Les prix du foncier y sont sans commune mesure avec ceux affichés en Belgique et plus encore aux Pays-Bas, où des terres agricoles sont valorisées à 90 000 euros l'hectare. Il faudra qu'un jour on pose un autre regard sur ces questions qui, comme d'autres, polluent le marché du foncier agricole et nuisent à l'agriculture française.

Quant à la planification écologique, une impulsion est donnée, même si nous ne savons pas encore précisément ce qu'elle recouvre. L'essentiel, c'est bien cet engagement ferme de faire prendre un virage écologique à l'agriculture française, tout en respectant son modèle et sa capacité à intégrer toutes les transformations qu'on lui impose. Là aussi, il faut laisser du temps au temps. L'agriculture doit pouvoir se transformer en gardant les mêmes performances et la même efficacité, pour conserver sa place sur les marchés. Les accords internationaux ont été attaqués par certains d'entre vous, mais il ne faut pas oublier que la France dégage un excédent net commercial de 10 milliards d'euros pour l'ensemble de ses produits alimentaires – et plus encore pour la filière vins et spiritueux. Ces résultats ne sont pas dus au hasard : nous disposons d'une agriculture performante, brillante, animée par des hommes et des femmes – agriculteurs, viticulteurs, maraîchers… –, qui sont à la pointe et qui, demain, continueront de propulser notre modèle agricole – à condition, cependant, de les laisser respirer.

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