Intervention de Pierre Dharréville

Séance en hémicycle du mercredi 25 octobre 2023 à 15h00
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 — Article 4

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre Dharréville :

Depuis plusieurs années, le montant M, seuil de déclenchement de la contribution du même nom, est régulièrement revu à la hausse, ce qui laisse davantage de marge aux entreprises pharmaceutiques. Les justifications avancées sont l'inflation et le développement de produits innovants, jugés plus coûteux.

En 2021, le montant M était de 23,99 milliards d'euros. L'article 4 tend à le relever à 24,9 milliards, contre 24,6 milliards initialement prévus dans le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale (PLFRSS) pour 2023. Cette disposition aura des effets financiers pour la branche maladie, à savoir une perte de recette de 120 millions d'euros en 2023.

L'étude d'impact indique que la mesure correspond à un « New Deal » conclu entre les pouvoirs publics et les entreprises du médicament, lesquelles s'engageraient « à conduire en 2024 des efforts plus importants de baisse de prix » et « des actions de régulation des volumes de vente sur le marché français ». Accroître la motivation financière des industriels et favoriser leurs marges, ce n'est pas tout à fait ce que nous aurions espéré d'un New Deal. En réalité, cette mesure ne transformera pas en profondeur le marché du médicament ; elle tend plutôt à le perpétuer.

Or les patients subissent un peu plus durement chaque année les effets pernicieux de ce marché. Les pénuries, notamment de médicaments matures tels que le Doliprane ou l'amoxicilline, se suivent et se ressemblent. Cela devrait nous amener non pas à considérer que ce sont les patients qui abusent et qu'il convient d'augmenter les franchises ou de vendre les médicaments à l'unité, mais à nous interroger sur les modalités de production. Je signale à cet égard l'excellent rapport remis il y a quelques semaines par nos collègues sénatrices Laurence Cohen et Sonia de La Provôté.

Il y a trente ans, 80 % des principes actifs étaient produits en Europe ; désormais, 60 % à 80 % d'entre eux sont importés. En France, on dénombre environ 270 sites de production pharmaceutique, dont une grande majorité sont des PME. Nous ne pouvons pas nous en tenir à cette situation. Nous pensons qu'il faut organiser une plus grande intervention de la puissance publique en matière de médicament. Nous proposons depuis très longtemps la création d'un pôle public du médicament, garant de la transparence et de prix justes, dont le rôle serait de faire levier pour produire les médicaments dont nous avons besoin.

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