Intervention de Marie-France Lorho

Réunion du mercredi 4 octobre 2023 à 9h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-France Lorho :

Nous saluons le retour de ce sujet, car nous faisons face à l'urgence en matière de violences intrafamiliales. Les violences à l'encontre des mineurs ont augmenté de 90 % depuis 2016. C'est un drame dont nous devons nous emparer. La lutte contre ce phénomène en constante croissance doit compter parmi nos priorités. C'est la raison pour laquelle le groupe Rassemblement national ne s'oppose pas sur le fond à ce texte tissé de bonnes intentions.

Mais celles-ci ne suffisent pas lorsque l'on écrit la loi. Vous affichez votre fermeté en ne laissant pas au juge d'alternative au retrait total de l'autorité parentale. Cela soulève des questions de notre part. Même si cette disposition semble répondre à l'intérêt de l'enfant, elle méconnaît la complexité de certaines situations et empêche d'utiliser un éventail plus large de mesures. C'est pourquoi notre amendement CL4 à l'article 2 propose que le juge puisse aussi se prononcer sur le retrait de l'exercice de l'autorité parentale.

Nous nous interrogeons aussi sur la suppression par le Sénat de l'article 4, qui prévoyait la remise au Parlement d'un rapport sur le repérage, la prise en charge et le suivi psychologique des enfants exposés aux violences conjugales et sur les modalités d'accompagnement parental. La rapporteure du Sénat, Mme Marie Mercier, a encouragé cette suppression au motif que l'article serait sans lien avec les dispositions initiales de la proposition. Si l'on peut entendre cet argument du point de vue strictement juridique, le lien direct de ce rapport avec l'objet de la proposition ne nous semble pas à démontrer. L'objectif de ce texte est de rendre plus systématique le retrait de l'autorité parentale par les juridictions pénales en cas de condamnation pour crimes commis sur son enfant ou sur l'autre parent, ou en cas d'agression sexuelle incestueuse sur son enfant. Pourquoi donc s'opposer à la création d'un rapport qui dresserait un état des lieux des conséquences psychologiques de ces agissements sur les enfants et qui permettrait à terme de proposer des mesures pour permettre leur guérison ?

L'élargissement du mécanisme de suspension provisoire de plein droit de l'exercice de l'autorité parentale dans le cadre des procédures pénales et la systématisation du retrait de l'autorité parentale – notamment en cas d'agression sexuelle incestueuse sur son enfant – nous paraissent être des mesures de bon sens. Le groupe Rassemblement national souscrira donc à ce texte dans sa globalité, mais il appelle à laisser davantage de souplesse d'appréciation au juge et dans les dispositions subsidiaires qui ont été introduites. La protection des mineurs est un sujet éminemment délicat qui doit nous inviter à la prudence. Le législateur ne doit en aucun cas se laisser guider par ses sentiments, si mauvais conseillers pour élaborer le droit. C'est la raison pour laquelle il importe de laisser au juge une marge de manœuvre afin de pouvoir remplir sa mission, qui consiste à se prononcer de manière équitable face aux situations qui lui sont soumises.

Notre rôle est bien entendu de remédier par tous les moyens à un phénomène alarmant et croissant. Mais nous devons aussi garder à l'esprit que notre mission est par nature de légiférer de manière strictement proportionnée, pour assurer le bien commun.

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