Intervention de Claude Ronceray

Réunion du jeudi 7 septembre 2023 à 9h10
Commission d'enquête sur les causes de l'incapacité de la france à atteindre les objectifs des plans successifs de maîtrise des impacts des produits phytosanitaires sur la santé humaine et environnementale et notamment sur les conditions de l'exercice des missions des autorités publiques en charge de la sécurité sanitaire

Claude Ronceray, Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux :

Nous partageons beaucoup de choses et peut-être me suis-je mal exprimé, car nous avons précisément tenté d'inscrire dans notre rapport de nombreux points évoqués dans votre intervention, notamment la question de l'adoption et de la marche accessible – comment sort-on d'un système que certains sociologues disent aujourd'hui marqué par un verrouillage sociotechnique ? Comment déverrouiller ce système et permettre aux agriculteurs d'en sortir pour adopter une meilleure pratique ? Comme vous l'avez indiqué, cela suppose tout à travail, un « design » de solutions qui soient adoptables. Ce mouvement est aujourd'hui largement en cours et un important travail de recherche et de transfert est engagé, qui doit être approfondi.

On peut compter à ce titre l'innovation variétale, les techniques de semis et le Bulletin du végétal, qui peut contribuer au choix du calendrier. L'effet de ces mesures n'est cependant pas à la hauteur de l'objectif fixé dans le cadre du plan Écophyto depuis son origine. Vous indiquez qu'il faut travailler filière par filière, mais il faut également travailler de manière transversale et interfilières – c'est l'enjeu de l'agroécologie : il ne suffit pas de construire toujours le même itinéraire très simplifié sur la même parcelle, comme c'est parfois la tendance aujourd'hui, notamment dans des exploitations de très grande taille. Certaines solutions utilisent aujourd'hui la nature – comme l'assolement, connu depuis très longtemps, qui minore les besoins en eau ou en autres intrants, et qu'il faut parvenir à promouvoir –, mais elles sont souvent interfilières, et non pas spécifiques à une filière.

L'agriculteur, qui se trouvait confortablement établi à l'intérieur de sa filière, doit aussi apprendre parfois à en sortir pour travailler selon une modalité plus transversale. À cet égard, la filière bio a pris un peu d'avance, car elle a déjà appris à travailler de cette manière, avec des échanges entre pairs au sein d'exploitations agricoles, dont les groupements d'agriculteurs biologiques (GAB). Ces échanges sont importants et il faut donc mener, parallèlement à la recherche très technologique sur certains sujets, tout un travail d'accompagnement, parfois de recréation des collectifs, lui aussi très important et qui doit également, semble-t-il, être mené à l'échelle territoriale. C'est l'un des points sur lesquels nous nous sommes rejoints.

J'ai donc l'impression que nous nous retrouvons sur bon nombre des points que vous avez évoqués, et que ce qui nous oppose est plus un écart de communication qu'une question de fond. Il nous semble que le plan Écophyto doit s'adresser en priorité aux agriculteurs. Les responsabilités ont été bien identifiées, en amont et en aval, au cours des éditions précédentes. Certains verrous sont dans notre main, et non pas dans celle des agriculteurs, et il faut bien les traiter. Certains échanges ont notamment montré l'importance du réseau de collecte et les blocages qui se situaient à cette échelle. Une action déterminée sur les réseaux de collecte peut ainsi aider à régler toute une série de difficultés qui ne peuvent l'être que dans de très grosses exploitations agricoles capables d'investir seules dans les dispositifs alors que, dans la plupart des cas, compte tenu de l'organisation des exploitations, c'est à une échelle collective qu'il faudra trouver des solutions.

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