Intervention de Esther Duflo

Réunion du mercredi 21 juin 2023 à 11h00
Commission des affaires étrangères

Esther Duflo, professeure au Massachusetts Institute of Technology et au Collège de France, prix Nobel d'économie de 2019 :

Je souhaite apporter une clarification : je n'ai jamais été la principale conseillère économique du président Obama, que je n'ai rencontré qu'une seule fois. J'ai simplement fait partie d'une commission chargée de réfléchir à l'architecture d'une nouvelle coopération entre les États-Unis et le reste du monde. Cette commission a d'ailleurs rendu un rapport qui n'a pas été pris en compte par les États-Unis.

Ensuite, il ne faut pas surestimer les flux dont on parle. L'engagement qui a été pris depuis des décennies maintenant porte sur un volume de dépense de 0,7 % du PIB, sous forme d'aide ou de coopération internationale. Mais aucun pays, y compris la France, n'a jamais atteint ce seuil, sauf certains pays d'Europe du Nord. Nous sommes donc très loin de dépenser une partie très importante de notre PIB pour ces questions.

De plus, la question de la solidarité est un choix démocratique. Un pays pourrait décider qu'il n'y a pas de raison d'être solidaire vis-à-vis des autres pays. Mais la question de la responsabilité vis-à-vis de nos comportements doit aussi être mentionnée. Ces deux éléments sont légèrement différents.

Il y a, d'une part, le financement « électif », par lequel on décide de dépenser une partie de son budget pour aider d'autres gens et, d'autre part, nos devoirs qui sont liés à la manière dont nous décidons de vivre notre vie. Compte tenu de nos émissions de carbone actuelles, nous imposons des coûts au reste du monde. Nous sommes une nation souveraine et dans le contexte actuel, rien ne nous oblige de payer pour ces coûts mais le débat doit être posé dans ces termes. Il ne s'agit pas de savoir si l'on a envie d'être généreux ou pas mais de savoir si l'on veut assumer les coûts impliqués par la manière dont nous décidons de vivre aujourd'hui. Nous pouvons aussi décider de vivre d'une manière beaucoup plus économe en matière d'émission de tonnes de carbone, ce qui limiterait notre facture vis-à-vis du reste du monde.

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