Intervention de Paul Molac

Séance en hémicycle du mardi 27 juin 2023 à 15h00
Accompagnement des élus locaux dans la lutte contre l'artificialisation des sols — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaul Molac :

Tout le monde s'accorde à vouloir protéger les terres agricoles et les milieux naturels. Mais, si le but est louable, la méthode doit être équitable. Nous devons repenser notre manière de construire, éviter l'étalement massif et la dévitalisation des centres-villes, préserver notre souveraineté alimentaire qui passe par la préservation des terres agricoles. Mais nous devons également préserver la vitalité et le développement des campagnes.

Le dispositif ZAN a été construit à la va-vite, créant beaucoup de difficultés et ouvrant peu de possibilités. Les élus locaux se sont retrouvés confrontés à une formule mathématique sans prise avec la réalité des dynamiques économique et démographique de leur territoire. Très vite, des frictions se sont fait jour. À ce propos, nous regrettons que les dents creuses de nos territoires ruraux ne puissent être urbanisées alors que ce serait un bon moyen d'économiser les terres agricoles.

Le dispositif proposé était mal ficelé, marqué par une vision urbaine et centralisatrice, une définition contestable, des données manquantes, une différenciation et une territorialisation insuffisantes, un flou entourant la comptabilisation des grands projets. Les conditions étaient réunies pour gripper le mécanisme.

Les maires sont particulièrement mécontents. Ils se demandent comment il leur sera possible de réaliser des projets, craignent de se retrouver coincés et incapables de développer leur commune, sans oublier le risque d'explosion dû à la raréfaction des terres qui crée des situations de rente pour les propriétaires et paupérise ceux qui n'ont pas de maison et de biens fonciers, en particulier les jeunes.

Il est temps de remettre les choses sur les bons rails. Cette proposition de loi sénatoriale va dans le bon sens car elle répond à certaines questions laissées latentes par la loi « climat et résilience ».

Elle prend en considération les projets de grande ampleur nationale ou européenne. Sont-ils toujours légitimes ? La question a été posée en début d'après-midi. Quoi qu'il en soit, certains territoires vont accueillir un nombre important d'infrastructures, ce qui les empêcherait de développer d'autres projets d'aménagement en l'état actuel du ZAN. En quelque sorte, il leur est demandé de choisir entre une ligne à grande vitesse et la construction de crèches, de logements ou de terrains de sport.

Vous avez tenté de résoudre le problème en créant un forfait national comprenant tous les projets de grande ampleur, qui sera soustrait de l'enveloppe nationale d'artificialisation répartie entre les régions. Cependant, deux inconnues demeurent. Quelle sera la formule assurant une pondération entre les régions ? Celles qui n'accueillent pas de projets structurants accepteront-elles d'en partager la charge ? Le débat n'est pas clos. Il aurait sans doute été plus simple de sortir ces grands projets de l'enveloppe, comme le demandent le Sénat et certains membres du Gouvernement.

Sur un autre sujet important, l'aménagement de nos communes rurales, le texte propose la garantie rurale, cet hectare laissé aux petites communes pour leur permettre de dégager des marges de manœuvre pour construire des infrastructures ou des logements. Une telle mesure redonne une perspective à celles qui redoutaient de perdre toute capacité d'adaptation.

Autre point positif : l'aménagement du calendrier, pour tenir compte dans les documents d'urbanisme des objectifs relatifs à l'artificialisation des sols.

Enfin, nous nous réjouissons de constater que, grâce à l'action du groupe LIOT, le dispositif fera l'objet d'une plus grande territorialisation, en particulier en Corse, où l'artificialisation sera mieux encadrée dans les communes soumises au RNU grâce à la sanctuarisation du plan d'aménagement et de développement durable de Corse (Padduc) – le cas de Porto-Vecchio nous a montré que cela s'imposait.

En revanche, d'autres sujets sont laissés en suspens, au premier rang desquels les sujets financiers. La lutte contre l'artificialisation des sols va profondément bouleverser la fiscalité locale. La dotation globale de fonctionnement (DGF) versée aux collectivités est corrélée de manière directe à la croissance et au développement d'une collectivité. Plus elle a d'infrastructures, de voiries et de services, plus sa DGF est élevée.

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