Intervention de Emmanuel Mandon

Séance en hémicycle du lundi 3 juillet 2023 à 16h00
Orientation et programmation du ministère de la justice 2023-2027 — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaEmmanuel Mandon :

La justice est garante de la démocratie. Les deux projets de loi que nous examinons prennent encore plus de sens aujourd'hui, eu égard à la violence aveugle qui secoue notre pays.

Depuis 2017, par six réformes législatives successives, votre prédécesseure et vous-même, monsieur le garde des sceaux, vous êtes ainsi attelés à redonner à notre justice les moyens de remplir son rôle fondamental, qui est d'assurer le respect des règles de vie en société. Indéniablement, ce qui se joue aujourd'hui, avec une particulière acuité, c'est l'affirmation de l'État de droit et la garantie du respect par tous de la loi et du droit. Le groupe Démocrate (MODEM et indépendants) salue votre engagement et la méthode que vous avez choisie. Elle repose, de manière constante, sur la consultation et l'écoute de ceux qui font ou qui ont affaire à la justice de notre pays. Les états généraux de la justice en sont une illustration réussie.

En premier lieu, nous soulignons les moyens budgétaires, qui sont en constante augmentation depuis six ans. Nous ne pouvons que soutenir l'effort inédit proposé aujourd'hui.

Les moyens augmentent certes considérablement, mais ils ne prendront tout leur sens que s'ils sont déployés au service d'une justice plus rapide, plus réaliste, d'une politique rénovée des services judiciaires et des juridictions. Tel est bien l'objectif des deux textes, associés à l'ouverture de plusieurs chantiers : répondre fermement, par un traitement attentif et spécifique, aux agressions qui minent notre société, en particulier aux violences intrafamiliales ; favoriser le recours systématique aux travaux d'intérêt général (TIG), trop rarement utilisés comme peine de substitution, surtout auprès des jeunes ; décharger le contentieux ordinaire par la voie judiciaire en imposant une véritable révolution du règlement à l'amiable ; expérimenter de nouvelles formes de contentieux, notamment en matière commerciale avec la création des TAE ; décentraliser la gestion matérielle des juridictions et la moderniser par le recours au numérique.

Comme cela a été dit, la refonte envisagée du code de procédure pénale viserait à rendre le droit compréhensible par tous, ainsi qu'à assurer une réponse adaptée à l'évolution des comportements délictueux : au-delà du droit constant, il convient de réfléchir rapidement, en tirant les leçons des événements actuels, à la manière de rétablir le rapport de certains jeunes à la loi. Vous l'avez reconnu : une telle réforme, aux enjeux démocratiques et sociétaux essentiels, ne saurait s'accomplir sans que le Parlement y soit étroitement associé, d'où l'initiative que le groupe Démocrate a prise en vue d'inscrire dans le cadre législatif la procédure correspondante. Son attention s'est également portée sur le délicat équilibre entre maintien de l'ordre public et respect des libertés fondamentales que doivent atteindre des innovations au demeurant indispensables, comme l'exploitation des données issues de la géolocalisation ou l'extension des perquisitions de nuit. Nous avons conscience que l'une des clés de la réussite de cette politique réside dans l'adhésion des magistrats, greffiers, personnels pénitentiaires et autres, ainsi que des avocats, acteurs pivots de la justice : entre autres mesures, les revalorisations de traitement devraient y contribuer.

Plus largement, nous relevons avec satisfaction la consécration de l'équipe qui entoure les magistrats, la redéfinition et la stabilisation des missions des personnels contractuels. Tout en approuvant, pour des raisons évidentes, le principe d'un concours professionnel, qui permettra d'augmenter le nombre des magistrats, nous souhaitons veiller à la qualité des procédures de recrutement et mieux réguler l'accès à la magistrature par cette voie. Par ailleurs, notre groupe comprend les inquiétudes de certaines catégories de personnels face au développement des embauches contractuelles d'attachés de justice et de surveillants de prison adjoints ; il souhaite donc également qu'une attention particulière soit portée à la qualité de ces recrutements. Se pose une nouvelle fois la question délicate de l'équilibre entre contingences budgétaires, attractivité et nécessité de préserver le niveau de service attendu par les justiciables.

Le groupe Démocrate s'engage à vos côtés dans ce débat, monsieur le garde des sceaux, de manière résolue et exigeante, au service d'une certaine idée de la justice, garante des droits fondamentaux.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion