Intervention de Stéphane Vojetta

Séance en hémicycle du mercredi 31 mai 2023 à 21h30
Lutte contre les arnaques et les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaStéphane Vojetta, rapporteur de la commission mixte paritaire :

Nous voici arrivés au terme d'un processus qui, d'une manière assez logique, a commencé pour moi sur les réseaux sociaux. Le 31 juillet dernier, un utilisateur de Twitter m'avait envoyé des alertes relatant des escroqueries et d'autres dérives de la part d'influenceurs. Je lui avais alors répondu que je suivrais ce sujet avec beaucoup d'intérêt.

Je l'ai effectivement suivi, mais je n'ai pas été le seul, loin de là. Outre mon corapporteur, Arthur Delaporte, nous sommes nombreux, sur tous les bancs de cet hémicycle, à l'avoir jugé digne d'intérêt. Nous avons mené des auditions, nous avons travaillé, et nous sommes arrivés à plusieurs conclusions.

L'influence commerciale manque trop souvent de transparence. Elle est trop souvent utilisée pour contourner les règles qui s'appliquent à la publicité sur ses canaux traditionnels. Les acteurs de l'influence commerciale ne sont pas suffisamment responsabilisés face à ces dérives.

Il en résulte une vulnérabilité des utilisateurs des réseaux sociaux, trop souvent victimes de publications commerciales problématiques – arnaques aux cryptomonnaies, aux paris sportifs, aux pratiques commerciales douteuses, au dropshipping ou au copy trading – ; victimes de représentations irréalistes de visages ou de corps idéaux qui n'existent que sur Photoshop ou à travers les filtres de TikTok ; victimes d'un mode de pensée où les rêves d'argent facile remplacent le travail, l'effort et le mérite.

Nous sommes nombreux dans cet hémicycle à avoir jugé que ces victimes méritaient notre attention, à avoir estimé que les consommateurs et les utilisateurs des réseaux méritaient la protection de la loi. Nous avons rapidement abouti à une conclusion limpide : l'activité d'influence commerciale doit être mieux définie et mieux régulée.

En votant cette proposition de loi, vous améliorerez cette régulation, envoyant ainsi un message important aux victimes : « Les parlementaires vous ont entendus et ils ont agi pour vous. »

Nous vous proposons donc de voter définitivement un texte qui a fait l'objet de cinq votes favorables. En commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale, il a été adopté à l'unanimité, comme il l'a été ensuite en séance publique de cette même assemblée, en commission des affaires économiques du Sénat, en séance publique au Sénat, et enfin en commission mixte paritaire (CMP).

J'espère que cette belle série se poursuivra ce soir, et nous vous proposons pour cela de valider un texte que les sénateurs ont su nourrir dans la continuité de l'esprit de la proposition de loi déposée par vos deux corapporteurs.

Ce texte n'a qu'une boussole, la protection des consommateurs. Et nous avons été guidés par quatre points cardinaux, à savoir la clarification, l'encadrement, la responsabilisation et l'éducation.

L'encadrement passe par l'obligation d'établir un contrat écrit entre l'influenceur et son agence ou son annonceur. La responsabilisation consiste à reprendre et à anticiper le règlement européen relatif à un marché unique des services numériques, ou Digital Services Act (DSA), en l'appliquant à l'influence commerciale, ce qui revient à imposer aux plateformes une série d'obligations pour que soient mis à disposition du public des outils de signalement et que les contenus soient modérés. Enfin, l'éducation implique d'intégrer à la formation aux risques numériques dispensée dans nos établissements scolaires une sensibilisation aux dangers d'ordre commercial.

Ce texte a déjà fait preuve de sa vertu pédagogique auprès des acteurs de l'influence. De nombreux pays regardent avec envie la France, premier pays à réguler l'activité d'influence commerciale d'une manière transversale et équilibrée.

Chers collègues, pour tout cela, je tiens à tous vous remercier, quelle que soit votre couleur politique. Je remercie également le Gouvernement, Bruno Le Maire, Olivia Grégoire, Jean-Noël Barrot et leurs équipes, pour le travail réalisé en confiance, ce qui nous a permis d'avancer rapidement. À ce propos, madame la ministre déléguée, je vous présente mes excuses pour avoir sans doute un peu bousculé le calendrier de Bercy – néanmoins, je ne peux vous promettre de ne pas recommencer. Bien sûr, je remercie également les lanceurs d'alerte, dont certains ont eu besoin de courage pour témoigner malgré les pressions.

Cependant, il faut reconnaître que notre travail sur ce texte s'est trop souvent déroulé devant une toile de fond délétère : la diffusion de valeurs détestables, les intimidations, les menaces, les accusations croisées de harcèlement, le doxing. Nous condamnons toutes ces violences et nous appelons tous les acteurs de ce secteur à la modération et à la tempérance.

Nous avons touché du doigt les excès des réseaux sociaux et la violence qui y règne trop souvent. Personnellement, j'en ressors encore plus convaincu de la nécessité de continuer à agir.

Chers collègues, cher Arthur Delaporte, c'est un fait, il est certains sujets sur lesquels nous ne nous mettrons jamais d'accord. Toutefois, je vous en conjure, il ne faut pas que cela nous empêche de continuer à travailler ensemble, dès demain, pour protéger les consommateurs et notre jeunesse face aux dangers du numérique et particulièrement des réseaux.

Nous approchons de l'examen du projet de loi sur le numérique et, tous ensemble, nous avons la capacité de faire vivre le débat et d'enrichir ce texte pour continuer à construire des digues efficaces contre l'accès des mineurs à la pornographie, contre les arnaques en ligne sous toutes leurs formes, contre la violence et le harcèlement sur internet.

J'ai confiance en notre force collective, en la capacité du Parlement à répondre aux attentes des citoyens,…

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