Intervention de Virginie Magnant

Réunion du mardi 16 mai 2023 à 21h05
Commission des affaires sociales

Virginie Magnant, directrice de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie :

La transformation de la CNSA en caisse nationale de sécurité sociale a pour objectif de décliner les outils qui en font la force, afin de renforcer l'équité dans l'accès aux droits des personnes. Cependant, elle vise également à conserver plusieurs des spécificités propres à ce domaine particulier des politiques publiques qui ne conçoivent pas sans les personnes concernées et leurs représentants – en conformité, avec la loi de 2005 sur l'égalité des droits et des chances pour les personnes en situation de handicap et avec les instruments internationaux qu'a ratifiés la France : la convention internationale sur les droits des personnes handicapées, notamment, prescrit cette idée du « rien pour nous sans nous ». Cette participation directe des personnes et de leurs représentants à la gouvernance des politiques publiques s'opère à travers le conseil de la CNSA.

Cette nouvelle caisse s'est profondément transformée depuis sa création, et notamment avec la signature de sa COG. Cet instrument participe en effet pleinement des instruments de pilotage de la sécurité sociale. Approuvée à l'unanimité par le conseil avant d'être signée le 8 avril, la COG a été travaillée avec le ministère et les membres du conseil qui ont pris soin de préciser, dans un long préambule, les objectifs et les promesses de la branche que la feuille de route pluriannuelle de la caisse pour la période 2022 à 2026 vise à concrétiser. Il s'agit de promesses très ambitieuses d'équité de traitement, dans un contexte où les différences de traitement dans ces politiques persistent. Si la plupart d'entre elles sont le plus souvent justifiées – puisqu'elles cherchent à s'adapter le plus possible à la diversité des situations des personnes –, certaines s'expliquent plus difficilement et doivent être corrigées.

Les trois axes de notre COG traitent précisément du renforcement de l'équité dans l'accès aux droits, de l'amélioration d'une offre d'accompagnement individualisée à destination des personnes âgées et en situation de handicap, et le renforcement de notre capacité de pilotage afin de promouvoir une gestion efficiente des moyens importants désormais mobilisés par cette branche.

L'un des objectifs de la création de cette branche était de pouvoir mobiliser, face à l'importante transition démographique que va connaître notre société, une ressource pérenne qui sera renforcée dès l'année prochaine avec une quote-part de CSG. Il est crucial que nous puissions rendre compte de l'emploi de cet effort accru de solidarité de la nation envers les personnes âgées et handicapées.

La signature de la COG s'est accompagnée d'une visibilité sur les moyens que la branche pourra mobiliser dans une trajectoire pluriannuelle, ce qui constitue là aussi une nouveauté. La convention fixe une feuille de route pour l'établissement, en l'assortissant de moyens financiers et humains garantissant l'atteinte de ces objectifs ambitieux.

S'agissant des moyens financiers, notre COG nous garantit de disposer de 2,7 milliards d'euros consacrés à la qualité du service d'information, d'orientation, d'évaluation et d'accompagnement à l'effectivité des droits. Ces moyens massifs nous permettront de déployer des démarches en ligne facilitées pour l'accès au droit et aux aides, une meilleure visibilité des guichets et des parcours mieux coordonnés dans le cadre du SPTA. Ils nous aideront également à généraliser la mesure de satisfaction des personnes et de transparence sur les résultats. Ces instruments sont tout à fait communs aux caisses nationales de sécurité sociale, mais la caisse les déploiera pour la première fois dans le champ de l'autonomie : nous pourrons nous appuyer sur les travaux réalisés en 2021 sur les MDPH, dont un baromètre régulièrement publié mesure désormais le taux de satisfaction.

En outre, la COG prévoit 3,8 milliards d'euros à l'appui de la transformation et de la modernisation de l'offre en dehors du fonds de financement des établissements et services sociaux et médico-sociaux. Ces enveloppes sont dédiées à la rénovation de places d'Ehpad, en mobilisant les moyens du Ségur de l'investissement, et, en lien avec le virage domiciliaire, au développement de solutions d'habitat intermédiaire, d'habitat nouveau et d'habitat inclusif. Ces derniers connaissent un remarquable essor sur le territoire. Enfin, des crédits sont prévus pour mettre en place des accompagnements précoces afin d'éviter les surhandicaps.

L'ensemble de la COG prévoit ainsi 80 équivalents temps plein (ETP) supplémentaires pour aider la caisse nationale à faire face à ses nouvelles missions ; si ce renforcement semble modeste, il représentera une augmentation de 80 % de nos effectifs. De surcroît, la trajectoire pluriannuelle de la COG nous permet de recruter ces effectifs essentiellement en 2022 et en 2023, pour que nous atteignions le plus rapidement notre cible en matière de ressources humaines. Ainsi, nous serons en mesure de répondre également aux nouvelles missions qui découleront des annonces de la récente Conférence nationale du handicap, de la feuille de route que prépare le ministre Jean-Christophe Combe et des dispositions de la proposition de loi en cours de discussion.

Outre la transformation interne de la caisse à laquelle nous nous sommes attelés en 2021 et en 2022, dont l'organisation était restée quasiment inchangée depuis sa création en 2004, nous avons reconfiguré tout au long de l'année 2022 avec les ARS et les conseils départementaux les modalités du travail de la caisse avec ces acteurs centraux. Nous avons ainsi convenu d'un nouveau cadre de coopération qui repose sur une animation multilatérale de nos relations, qui remplacera l'ancien fonctionnement en silo.

Cette réflexion s'est inspirée des exemples européens, notre démarche de transformation étant soutenue par la direction générale de l'appui à la réforme structurelle de la Commission européenne : la création d'une cinquième branche apparaissait à cette dernière comme un modèle exemplaire pour répondre à la transition démographique et original à la fois. Nous nous sommes donc penchés sur les modèles allemand et suédois, pour identifier de bonnes pratiques en matière de pilotage par indicateur, renforcer la mesure d'impact et travailler sur des conventionnements pluriannuels et donc tripartites. Je rejoins pleinement votre proposition, madame la députée, de développer ce type de conventionnement, qui sera déployé dès 2024. En amont de ce travail, nous engageons dès cette année un nouveau format de dialogue avec les ARS et les conseils départementaux sous la forme de rencontres territoriales afin d'échanger sur la préparation de ces feuilles de route et ces objectifs communs, qui ont vocation à être déclinés de manière très opérationnelle.

Enfin, je voudrais illustrer par trois exemples les chantiers nous avons entamés pour renforcer l'équité territoriale.

Le premier est un déploiement des systèmes d'information sans commune mesure avec les autres caisses nationales. Les systèmes d'information nationaux forment une ossature qui permet de s'assurer que les droits soient déclinés de la même manière sur l'ensemble du territoire, et de disposer d'informations en temps réel : ils vous sont d'ailleurs utiles pour élaborer un pilotage territoire et national.

Lorsque vous avez voté notre transformation en caisse nationale de sécurité sociale, vous nous avez en effet autorisés à développer un système d'information national pour la gestion de l'APA. Ce projet inédit équipera des services des conseils départementaux pour la gestion d'une prestation relevant de leur compétence et partiellement financée par les crédits de la branche autonomie. Entamé l'année dernière, ce projet devrait être déployé au second semestre 2024. Il représentera une avancée importante pour outiller les professionnels, avec, par exemple, un système d'information intégrant des référentiels communs, dans une logique de facilitation des démarches des personnes.

Le deuxième outil important pour conforter l'équité de traitement et l'amélioration des services est une mission d'appui opérationnel aux MDPH qui rencontrent des difficultés, préfigurée dès l'année 2021. Elle continue d'intervenir auprès d'une vingtaine de MDPH, dont les délais de réponse, notamment, étaient trop longs. Nous avons d'ores et déjà contractualisé avec treize d'entre elles des plans d'amélioration.

Enfin, je tiens à souligner la mise en œuvre, à compter de cette année, d'une mission de contrôle interne et de conformité, qui pourra étendre son action aux MDPH et aux maisons départementales de l'autonomie. Nous souhaiterions qu'elle puisse réaliser des audits, en particulier si la proposition de loi en cours de discussion prospère, car elle comporte des dispositions en ce sens.

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