Intervention de Danielle Simonnet

Réunion du jeudi 11 mai 2023 à 14h00
Commission d'enquête relative aux révélations des uber files : l'ubérisation, son lobbying et ses conséquences

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDanielle Simonnet, rapporteure :

Il y a clairement, à ce moment-là, une position idéologique assumée par Emmanuel Macron. Ce positionnement n'est pas nouveau puisque M. Macron a été le rapporteur adjoint de la commission Attali sur La libération de la croissance, qui a conduit à la « loi Novelli » et à la création du statut d'autoentrepreneur. Il y a donc une cohérence dans sa volonté de tout libéraliser.

Il ne s'agit pas de remettre cela en cause, mais, à travers les révélations des Uber files, de s'interroger sur la portée de ces échanges réguliers entre une plateforme américaine, hors la loi dans bien des domaines, et un ministre en exercice. Je vous livre un de ces échanges, entre Mark MacGann et le ministre de l'Économie de l'époque : « Désolé de vous embêter, mais il y a en ce moment une descente d'une vingtaine de fonctionnaires de la direction des Finances publiques. Ils disent qu'ils vont mettre les dirigeants en garde à vue. Leur mandat : taxation d'Uber BV, qui gère tout Uber dans cinquante pays. Nous avions espoir de pouvoir atteindre le fameux climat d'apaisement dès ce week-end. Pouvez-vous demander à vos services de nous conseiller ? Merci. Mark MacGann. »

Il existe d'autres messages de cette nature. L'un d'entre eux a été envoyé par les responsables d'Uber à la suite d'un arrêté pris dans les Bouches-du-Rhône par le préfet Laurent Nuñez. Emmanuel Macron répond : « Je vais regarder cela personnellement. Faites-moi passer tous les éléments factuels et nous décidons d'ici ce soir. Restons calmes à ce stade, je vous fais confiance ». Le discours que vous tenez en tant que Premier ministre à l'époque et ceux du ministre de l'Intérieur et du secrétaire d'État chargé des Transports attestent l'opacité qui pouvait exister dans les relations entre le ministre de l'Économie et Uber, puisque vous n'en avez pas eu connaissance.

A priori, vos collègues ont confirmé ce que vous laissez entendre, à savoir que dans le cadre des arbitrages, vous n'avez pas subi d'influence ni de pressions indirectes provenant de ces lobbys, ou exprimées telles quelles par Emmanuel Macron. S'agissant du débat parlementaire, sans doute celui-ci était-il trop éloigné des cercles du pouvoir pour que cette influence et cette pression puissent s'exercer. Néanmoins, avec le recul, on peut se dire qu'Emmanuel Macron était minoritaire à l'époque et qu'il n'a pas réussi à obtenir les arbitrages qu'il promettait à Uber. Ou peut-être a-t-il, pour des raisons que j'ignore, volontairement menti à cette entreprise, en lui faisant croire qu'il allait défendre ses intérêts ? En tout état de cause, il prenait, dans ses messages, des engagements forts. M. Cazeneuve et M. Vidalies ont affirmé avoir été choqués par ce type de relations, M. Cazeneuve disant clairement que l'on n'a pas à négocier avec une entreprise hors la loi.

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