Intervention de Katiana Levavasseur

Séance en hémicycle du mercredi 8 mars 2023 à 21h30
Accompagnement des couples confrontés à une fausse couche — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaKatiana Levavasseur :

Alors que se termine la journée du 8 mars, nous ne pouvons que constater que de nombreux progrès doivent encore être réalisés pour favoriser l'épanouissement et garantir le droit des femmes dans notre société. Je tiens à remercier Mme Josso de s'être saisie de ce sujet délicat mais important, la fausse couche.

Encore difficile à évoquer, ce n'est pas une question qui est souvent abordée aux débuts d'une grossesse. Minimisée, négligée, banalisée parfois par le corps médical, la fausse couche est pourtant fréquente et concerne chaque année 200 000 femmes. Une femme sur dix y serait confrontée au moins une fois dans sa vie. Nous avons tous été touchés de près ou de loin, nous connaissons tous un couple, une femme qui a vécu une fausse couche. C'est le cas de l'une de vos collègues.

Oui, j'avais alors 20 ans et j'étais enceinte de presque cinq mois. Alors que tout, dans mon esprit et celui de mon mari, était prêt pour l'heureux événement, j'ai ressenti des douleurs, des contractions, eu des pertes. À l'hôpital, j'ai été prise en charge dans le service des urgences pédiatriques, où j'ai été mise de côté, à l'écart. On m'a ensuite transférée dans une chambre où se trouvaient d'autres femmes, et où j'ai attendu que le produit que l'on m'avait administré agisse, avant qu'ils effectuent « l'aspiration », comme ils disaient. Je me suis remise seule de mon anesthésie générale en salle de réveil, puis un médecin est venu m'annoncer que je pouvais quitter l'hôpital. C'est tout. Aucun suivi médical ou psychologique ne m'a été proposé. On m'a seulement remis une ordonnance, pour traiter les pertes qui pouvaient encore se produire.

Mon histoire n'est pas unique, nous sommes nombreuses à avoir vécu cette situation, beaucoup la vivront encore. Chaque histoire, chaque vécu est singulier, mais je souhaite que les femmes cessent de se culpabiliser, qu'elles se sentent écoutées, entendues et accompagnées lorsque survient ce drame. Car oui, « la double perte que représentent la perte réelle de l'embryon ou du fœtus et la perte symbolique de la réalisation du désir d'enfant », comme l'écrit la rapporteure, peut être un drame.

Certes, toutes les femmes n'ont pas subi une intervention sous anesthésie ou une aspiration, toutes n'ont pas connu une interruption spontanée à cinq mois de grossesse – une grande partie des arrêts surviennent au cours des premières semaines de gestation –, toutes n'ont pas ressenti le besoin d'en parler. Mais parce que ce phénomène est naturel, indépendant de la volonté et qu'il peut toucher toutes les femmes enceintes, nous devons permettre à celles qui y sont confrontées d'être accompagnées, si elles en ressentent le besoin, par des professionnels qui pourront apaiser leur peine.

Sans doute ne faut-il pas méjuger le dévouement et la qualité du personnel médical, souvent surchargé de travail. Mon histoire remonte à quelques années et depuis, l'accueil des patientes a été amélioré. Mais il y a encore des progrès à faire. La société doit prendre conscience des répercussions émotionnelles que cet événement traumatique, quel que soit le moment de la grossesse où il survient, peut avoir pour une femme, mais aussi pour son conjoint ou sa conjointe.

En effet, le partenaire, lorsqu'il est présent, est tout autant impliqué dans cette expérience. Aussi avons-nous été très satisfaits de la position unanime qui a prévalu en commission sur la nécessité d'intégrer le partenaire dans le dispositif d'accompagnement psychologique.

Le chagrin, la tristesse, la colère, la culpabilité et de désespoir sont souvent ressentis par les couples ; il est important qu'ils sachent qu'ils ne sont pas seuls dans leur douleur. Ils doivent pouvoir être accompagnés et adressés à des psychologues par des sages-femmes, souvent présentes lors de ce moment.

Il est essentiel que la société reconnaisse que la fausse couche est un événement douloureux qui peut nécessiter un accompagnement psychologique approprié, peu importe l'âge gestationnel. C'est ce que la force publique doit mettre en œuvre. Le groupe Rassemblement national votera pour cette proposition de loi, qui va précisément dans ce sens.

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