Intervention de Caroline Yadan

Séance en hémicycle du jeudi 8 décembre 2022 à 9h00
Accord relatif à l'exécution des peines prononcées par la cour pénale internationale — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCaroline Yadan :

Notre collègue rapporteur nous a présenté avec talent le contenu et les enjeux de l'accord sur l'exécution des peines prononcées par la Cour pénale internationale et, surtout, son importance pour la durabilité de la paix, particulièrement précarisée et fragilisée par un environnement en voie de brutalisation, toujours plus conflictuel. Car c'est bien de paix qu'il s'agit dans l'accord passé entre le Gouvernement et la CPI.

Promouvoir la paix, c'est d'abord refuser toute dénaturation de sa définition et son appropriation par certains États à mauvais escient. C'est refuser, ensuite, l'existence d'un ordre international au sein duquel la domination et la loi du plus fort pourraient se substituer à notre droit. Promouvoir la paix, c'est, enfin, revenir aux principes premiers de l'universalisme et de la justice internationale. Comme l'affirmait Emmanuel Kant en 1795 : « Ne peut être reconnu comme traité de paix celui qui porterait les principes d'une nouvelle guerre ». En somme, promouvoir la paix et la construire au moyen du droit, c'est refuser l'impunité et participer pleinement à la justice internationale afin qu'elle établisse la réalité des crimes, qu'elle juge les coupables, qu'elle participe à la manifestation de la vérité et qu'elle s'appuie sur des institutions et des administrations efficaces, solides, justes et fiables.

Parce qu'elle n'a pas de police propre ni de services qui lui permettent de recueillir elle-même les éléments de preuve, la Cour pénale internationale a indéniablement besoin des États pour s'organiser et faire exécuter ses peines. À travers ce texte, le Gouvernement réaffirme et assume des choix responsables et courageux pour rendre la justice internationale opérationnelle : le choix d'un engagement volontaire et pleinement libre dans le fonctionnement de la justice internationale et contre les crimes les plus graves – génocide, crime de guerre, crime contre l'humanité, crime d'agression ; le choix d'être parmi les premiers contributeurs à l'organisation de la Cour, financièrement et humainement ; le choix de concrétiser et de rendre opérantes les procédures pénales et l'application des peines y afférentes ; enfin, le choix de permettre une exécution fluide et pertinente des sanctions prononcées par la Cour en dernier ressort, sans renégociation systématique des conditions d'accueil et de détention de la personne condamnée.

Cet engagement du Gouvernement en faveur de l'exécution des peines prononcées par la Cour est d'autant plus essentiel que notre monde est fracturé par les négationnismes de tout genre, par les nationalismes dangereux, par les tentatives de faire reculer la démocratie, par l'érosion des espaces de liberté d'expression, par les dictateurs méprisant les droits de l'homme et par les fantasmes de pureté ethnique ou religieuse. Alors que nous avons fêté le vingtième anniversaire de la CPI en 2018, le monde actuel n'est pas devenu moins violent, ni plus juste. Impossible, en effet, d'ignorer les terribles conflits qui ont été ou sont encore déclenchés par certaines grandes puissances et qui ont touché la Libye, la Syrie et, plus récemment encore, l'Ukraine, à moins de s'en rendre complice et de renier toutes nos valeurs. Comment ne pas penser aux images insoutenables des crimes commis à Boutcha, Kharkiv, Marioupol, Izioum, ou encore Kherson ? Comment ne pas penser aux témoignages qui font état d'exactions commises par les soldats azerbaïdjanais sur des civils et militaires arméniens ? Comment ne pas penser aux exécutions, viols, tortures, pillages, abus sur les enfants, travail forcé qui auraient été perpétrés par des militaires dans l'est de la République démocratique du Congo ?

En ce sens, le projet de loi autorisant l'accord entre le Gouvernement et la juridiction pénale internationale est fondamental. Il témoigne de l'engagement de la France, du soutien de notre pays à la Cour et de la nécessité d'une justice internationale au service de la paix. Plus qu'un simple accord technique, ce projet de loi soulève, en fait, une question cruciale : celle de confirmer et de soutenir l'existence d'une juridiction capable de faire respecter le droit international et de punir les crimes les plus graves. C'est la raison pour laquelle notre groupe votera bien évidemment en faveur de ce texte.

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