Intervention de Nicolas Turquois

Séance en hémicycle du jeudi 1er décembre 2022 à 9h00
Retraite de base des non-salariés agricoles — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNicolas Turquois :

À partir de 1990, s'appuyant sur des revenus réels, la MSA a transformé ceux-ci en points, selon une règle assez complexe que je me permets de vous expliquer. En valeur 2022, entre 0 et 5 000 euros de revenus annuels, on a 23 points. Entre 5 000 et 8 000 euros, on passe progressivement de 23 à 30 points. De 8 000 à 16 000 euros, alors que l'effort contributif va du simple au double – 20 % de 16 000 étant le double de 20 % de 8 000 –, on reste à 30 points. De 16 000 euros jusqu'au plafond de la sécurité sociale, on passe progressivement de 30 à 113 points, et au-delà, on ne cotise que pour la solidarité. Or la MSA explique que jusqu'en 2014, elle n'a le souvenir que des points, et non des revenus qui leur sont associés. Si l'on a 30 points pour l'année 2010, était-ce pour un revenu de 16 000 ou bien de 8 000 euros ? Comment reconstituer les vingt-cinq meilleures années dans ces conditions ?

Il faut ensuite évoquer l'architecture du système. Aujourd'hui, le système agricole est une fusée à cinq étages : une retraite forfaitaire proportionnelle à la durée ; une retraite proportionnelle par points – celle dont je viens de vous parler, qui n'est pas vraiment proportionnelle, mais progressive ; un complément de retraite – l'équivalent du minimum contributif du régime général, qu'on appelle PMR, pension minimale de référence ; un système de retraite complémentaire par points – qui ne sont pas les mêmes points que ceux évoqués précédemment ; enfin, un complément différentiel, que nous avons récemment revalorisé grâce à notre collègue Chassaigne. Comment transformer ce système à cinq niveaux en système basé sur les vingt-cinq meilleures années ? Je vous invite à réfléchir à cette question en termes de méthode, chers collègues. C'est un vrai sujet. Pour moi, le vrai courage aurait consisté à rapprocher les règles du système de la MSA de celles du système général. Certains ont peur que cela conduise à une remise en cause des caisses de la MSA ; je crois quant à moi que ces dernières ont un avantage spécifique, celui d'être un guichet unique de la protection sociale et de constituer ainsi un relais de proximité avec les élus dans les territoires. Ce n'est pas la complexité des règles qui contribuera au maintien des caisses de la MSA.

J'ai également un doute s'agissant de l'équité du système. Celui-ci est actuellement très redistributif : ceux dont les revenus dépassent le plafond de la sécurité sociale cotisent pour les autres et ceux qui perçoivent 16 000 euros cotisent pour ceux qui perçoivent 8 000 euros. Cela doit être pris en compte dans le futur système. J'ai un autre doute quant au vecteur juridique : vous évoquez un décret dans votre amendement de réécriture, monsieur le rapporteur, mais aussi les dispositions législatives sur lesquelles le rapport proposé pourrait déboucher. Il me semble que la modification de droits individuels relève de la loi – l'expertise nous le montrera.

Compte tenu de cet amendement, qui modifie le texte examiné en commission et prévoit un rapport d'évaluation, notre groupe votera ce texte. Mais je suis prêt à parier que la mise en œuvre de celui-ci sera très progressive, qu'elle impliquera de modifier en profondeur le système, qu'il faudra en passer par la loi et qu'un effort financier devra être prévu en matière de cotisations. Il me semblait important de le dire. Je vous remercie, monsieur le rapporteur, de vous être penché sur ce sujet ; votre texte constituera une véritable avancée. Soyons cependant modestes quant au calendrier de sa mise en œuvre et quant à ses modalités.

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